Karim Essemiani, fondateur de Gwenneg à Rennes : « Ne me parlez pas de racines bretonnes, parlez-moi de feuilles ! »

Avec sa plate-forme de financement participatif, Karim Essemiani nous aide à financer nos projets d’entreprise. Mais aussi à devenir des « consomm’acteurs », et à élargir nos horizons…

Quand est née l’entreprise Gwenneg et combien êtes-vous à y travailler  ?

Gwenneg a été créée en janvier 2015 et la plateforme a été lancée 6 mois plus tard. Il y a maintenant 6 personnes dans la structure, donc 4 salariés.

Qu’est-ce qui vous a amené à créer Gwenneg ?

J’ai eu l’idée de Gwenneg pour réagir à une situation que je trouve inacceptable, et dont j’ai fait concrètement l’expérience : la difficulté pour les entrepreneurs à trouver des investisseurs. En 2012, nous sommes venus avec ma femme et mon fils nous installer en Bretagne. Je venais travailler pour la BCI (Bretagne Commerce International). J’accompagnais les entreprises étrangères voulant s’implanter ou investir en Bretagne. Mais je passais de plus en plus de temps à aider des entreprises bretonnes qui souhaitaient faire de l’export ou se développer et qui n’y parvenaient pas faute de financement. Je voyais de bonnes idées qui ne pouvaient se concrétiser faute de trouver des investisseurs !

Vous aviez déjà une expérience de la création d’entreprise ?

Pas du tout, je n’avais au départ pas spécialement la fibre entrepreneuriale, créer une entreprise n’était pas du tout dans mes objectifs ! Je suis né et j’ai fait mes études d’ingénieur en Algérie, et suis venu passer mon doctorat à Toulouse. J’ai travaillé pendant 15 ans comme directeur commercial à l’international d’un grand groupe (Veolia), ce qui m’a amené à beaucoup voyager, en Asie, au Moyen-Orient et aux Etats-Unis, où j’ai vécu pendant 5 ans. Tout cela a été pour moi une expérience très formatrice et très riche humainement.

Comment vous êtes-vous préparé à ce virage de la création d’entreprise ?

Tout d’abord, j’ai repris mes études, en 2014. C’était en formation continue, le vendredi soir et le samedi. J’habitais à Bruz (et c’est toujours le cas), et travaillais pour la BCI. J’allais tous les week-end à Paris, et travaillais 4 heures le soir en plus de mon travail.

Quelle formation avez-vous suivie ?

J’ai préparé un Executive MBA à HEC. Cela a été un gros sacrifice, à tout niveau ! Sur le plan familial, personnel et financier, car ce sont des formations qui coûtent très cher.

Ensuite vous vous êtes tourné vers des financeurs ou des partenaires ?

Avant cela, j’ai d’abord contacté les leaders nationaux des plateformes de financement participatif, car je pensais pouvoir les déployer en Bretagne. Mais j’ai vu que ce n’était pas une bonne idée. J’ai décidé de créer une plateforme de crowdfunding spécialement dédiée à la Bretagne. J’ai obtenu des partenariats avec le réseau Entreprendre, la marque Bretagne, le Conseil régional, des sociétés de capital risque, le Comité création-reprise… Et il y a eu une première levée de fond en juin 2015.

Comment connaissiez-vous la Bretagne avant de venir y travailler en 2012 ?

J’ai découvert la Bretagne il y a un peu plus de 20 ans, grâce à mon épouse qui est finistérienne. J’y venais régulièrement l’été, pour des vacances, mais dans mon esprit c’était compliqué d’y trouver du travail. Comme beaucoup, je suis attaché à cette région, et suis heureux de pouvoir y travailler car elle offre une grande qualité de vie. Mais pour cela il faut soutenir le développement économique en Bretagne, et c’est ce que j’ai voulu faire en créant Gwenneg.

Comment définissez-vous le financement participatif ?

Le financement participatif ou crowdfunding c’est le « financement par la foule » : une personne ou une entreprise qui a un besoin de financement se fait financer par d’autres personnes. On peut distinguer trois modes de financement : premièrement le don (ou bien le « don contre don » (il y a une contrepartie, et en quelque sorte on « pré-achète » un produit) ; deuxièmement le capital (je deviens un investisseur en entrant dans le capital de l’entreprise) ; troisièmement le prêt, comme le font les banques. Gwenneg propose les trois solutions de financement.

De plus en plus de gens se tournent vers le crowdfunding pour financer leurs projets, cela devient donc de plus en plus difficile de « sortir du lot », non ?

Le crowdfunding est entré dans les mœurs en très peu de temps ! C’est un secteur qui s’est extrêmement et rapidement démocratisé. Pour vous en donner une idée en 2010, il y a eu environ 7 millions d’euros collectés en France par ce moyen ; en 2015, plus de 297 millions ! Cela veut dire que les porteurs de projet doivent maintenant « mouiller le maillot », valoriser leur produit, et ne pas relâcher leurs efforts pour aboutir. Une campagne est un peu comme un marathon. Il ne faut pas partir en se disant « Je fais partie d’un réseau et tout le monde va m’aider ! », ça ne marche pas comme ça. Notre plateforme Gwenneg offre justement un accompagnement, des formations, un coaching ! Mais malgré son succès, on est encore dans une phase « d’évangélisation » de ce mode de financement : nous devons le faire connaître beaucoup mieux.

Quelle est la spécificité de Gwenneg par rapport aux autres plateformes de financement participatif ?

Il y en a plusieurs, d’abord, on propose 3 formes de financement, comme je vous l’ai dit ; ensuite on ne s’adresse qu’aux projets économiques (pas aux projets associatifs) ; enfin les projets doivent avoir un lien avec la Bretagne (en incluant la Loire-Atlantique). Les projets viennent le plus souvent d’entreprises basées en Bretagne, mais on ne regarde pas que la localisation géographique, il faut que les projets aient du sens par rapport au territoire breton.

Est-ce que tout le monde peut devenir prêteur ou donateur ?

Oui parce que le ticket d’entrée est très bas ! Vous pouvez être contributeur à partir de 5 euros, vous pouvez être prêteur à partir de 20, investisseur à partir de 100 euros. Le but est vraiment de faire connaître à monsieur Tout-le-monde la possibilité de soutenir le développement économique du territoire. Que les gens deviennent « consomm’acteurs » !

Qu’est-ce qui peut encourager à devenir prêteur ?

Le prêteur, en aidant une entreprise bretonne à se financer, fait un geste « socialement responsable ». Et le prêt va lui rapporter entre 4 et 9 % de taux d¹intérêt. Bien plus que le livret A !

Toutes les entreprises peuvent postuler pour lancer leur campagne chez vous ?

Oui, toutes les entreprises – créées ou en phase de création – peuvent s’adresser à nous. On examine tous les projets et si nécessaire on sert aussi de relais vers les réseaux Initiatives, les réseaux Entreprendre, les CCI. Avant de lancer une campagne on procède d’abord à une sorte d’audit – plus ou moins détaillé et important en fonction de la taille du projet. On évalue le produit et la capacité du porteur de projet à tenir ses objectifs et à honorer ses contreparties. L’idée est aussi de ne pas berner les contributeurs et de créer un climat de confiance.

Quel est le premier conseil que vous donnez aux porteurs de projet ?

Tout d’abord nous les invitons à voir la campagne de crowdfunding comme un vrai test « grandeur nature » ! Le financement participatif doit permettre de voir si mon projet ou mon produit plaît, s’il y a des clients pour ça, et de mettre à l’épreuve mes propres capacités à conduire et concrétiser mon projet, à convaincre, à vendre ! Si le chiffre d’affaires est difficile à faire à un petit niveau, il le sera aussi à une plus grande échelle. Quand on démarre une campagne de crowdfunding, on touche facilement le premier cercle (les amis, la famille) et le deuxième (le voisinage et toutes nos relations), mais l’idéal est aussi de convaincre le troisième cercle, les gens qui ne nous connaissait pas. On n’est pas que dans la bienveillance, comme dans le projet associatif.

La communication via les réseaux sociaux est aussi un critère de réussite important dans ces campagnes ?

Oui, c’est pourquoi Gwenneg propose un accompagnement pour utiliser les réseaux sociaux, du début à la fin de la campagne. Mais aussi pour formuler ses idées, trouver quelles contreparties donner, et un coaching tout au long de la campagne. Et ça marche, puisque chez Gwenneg nous avons un taux de réussite supérieur à 93 %. En comparaison, les taux de réussite moyens en France sur des campagnes de prévente (en don contre don) est de moins de 60 %. Cela dit l’échec d’une campagne peut être enrichissante si on en tire les leçons !

En quoi est-ce important de bien choisir ses contreparties ?

C’est très important car elles peuvent constituer une prévente. Elles doivent présenter le projet. Si des clients ont pré-acheté mon produit, cela pourra aussi m’aider à convaincre un banquier ou un investisseur… Les gens qui font un don vont constituer les premiers clients de la future entreprise.

Expliquez-nous ce que sont les Crêpes Pitch ?

Les Crêpes Pitch, et les Galettes-saucisse Pitch, ce sont des rendez-vous que nous organisons une fois par mois, où les porteurs de projet peuvent rencontrer le public. Il y en a eu quatre l’an dernier, et cela marche super bien. A Rennes par exemple, 80 personnes sont venues rencontrer 4 porteurs de projets. Il y a des questions-réponses avec le public, et de vrais échanges. On termine par crêpes ou galettes et bolée de cidre. Là on est une vraie plateforme de proximité, on n’est plus dans le virtuel ! Notre but est d’en faire dans chaque grande ville bretonne.

Vous qui ne pensiez pas du tout devenir entrepreneur, comment vivez-vous ce nouveau statut ?

Je gagnais très bien ma vie chez Veolia, mais l’argent ne fait pas le bonheur. Travailler c’est bien mais il faut que ça donne du sens. Gwenneg donne du sens, pas seulement à moi mais à beaucoup de personnes. Mais nous faisons aussi face à la réserve des acteurs institutionnels. Créer une entreprise en France, c’est très compliqué ! Dans notre pays on imagine les chefs d’entreprise comme des gens gagnants très bien leur vie, ou qui s’enrichissent sur le dos des salariés. Ce qui est rarement le cas, car créer une entreprise c’est avant tout beaucoup de sacrifices, donc il y a parfois une certaine frustration ! Heureusement, Gwenneg est sur la bonne voie – même si on reste très vigilants. Et il y a une très belle histoire qui s’écrit en ce moment. Notre entreprise a reçu une recommandation par l’autorité des marchés de faire une levée de fonds rapidement. Des hommes et des femmes du territoire se sont mobilisés pour nous aider (plus une centaine de personnes ont donné 1000 euros chacun). Cela nous donne une assise financière mais surtout une légitimité !

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur le fonctionnement interne de la start-up  Gwenneg ?

Il est peut-être assez loin du cliché des start-up ! J’ai un parcours un peu atypique. J’ai maintenant 44 ans, j’ai passé 15 ans dans un grand groupe et principalement à l’étranger, je suis formaté en gestion de projets… Et j’ai aussi acquis pas mal d’expérience de mes « erreurs » passées ! La gestion d’une start up avec un esprit « tout est cool », ne fonctionnerait pas, nous sommes aussi un centre de profit ! Notre entreprise a des processus internes, sans pour autant tomber dans la rigidité et l’inertie qui handicape les grands groupes. L’avantage d’être une petite entreprise, c’est qu’on peut facilement intégrer les retours d’expérience des différentes campagnes et adapter ou enrichir notre offre. Et les collaborateurs travaillent en toute autonomie, en proposant des pistes de développement, de réflexion, des plans d’action.

Peut-on dire que les Bretons sont entreprenants ?

Oui, la région Bretagne se place 5ème en termes de propriété intellectuelle. Les Néo-Bretons sont entreprenants et fiers de leur territoire. Pour moi la Bretagne est riche de sa diversité, de son excellence et de son système éducatif. Nous subissons actuellement des mutations violentes, comme dans l’agriculture, et en même temps on voit la naissance de nouvelles filières, comme le numérique, la mer, les biotechnologies… toutes ces mutations présentent de vraies opportunités.

Qu’appelez-vous les Néo-Bretons ?

Tous ceux qui vivent en Bretagne et aiment cette région, qu’ils soient d’origine bretonne ou non, nés en Bretagne ou pas. Quand on me parle de la Bretagne, je dis souvent : « Ne me parlez pas des racines, parlez-moi des feuilles ! » La Bretagne ne doit pas être que « la terre de mes ancêtres », mais aussi « la terre de mes enfants » ! Autrement dit on ne nait pas Breton, on le devient !

Parlez-nous un peu de vous, quelles sont vos activités en dehors du travail ?

Le lancement d’une entreprise exige beaucoup de temps et d’énergie ! Le peu de temps qu’il me reste, je le consacre à ma famille. J’ai passé un contrat avec ma femme, et j’espère bientôt pouvoir me libérer plus de temps ! Pour aller écouter un concert de jazz, par exemple ! J’étais jusqu’à l’année dernière éducateur bénévole du club de rugby de Bruz, et je fais aussi partie du conseil d’administration de l’antenne rennaise de la Fondation Agir contre l’Exclusion. J’ai eu la chance d’évoluer dans un milieu privilégié, mais pour moi c’est important de m’engager et de rester proche des gens.

Qu’avez-vous retenu de vos voyages ou de votre vie aux Etats-Unis ?

J’ai une vraie culture anglo-saxonne et ma femme et moi avons particulièrement aimé la vie aux Etats-Unis. Là-bas, les gens sont très modestes et accessibles. On est dans des relations humaines très saines, et dans le travail il y a peu d’occasions de conflits. En France on est dans une société très corporatiste, élitiste, et pyramidale. On aime bien dire de quelle école on vient, alors qu’aux Etats-Unis on aime bien dire ce qu’on sait faire ! C’est pourquoi je mets très peu en avant mes diplômes.

Avez-vous déjà ressenti ici en France un sentiment d’exclusion ?

La question ne s’est jamais posée pour moi. Je suis quelqu’un qui travaille beaucoup, et j’ai toujours appris que seule l’excellence prime. On m’a toujours appris à me prendre en main ; à ne pas regretter ce qu’on fait ou ce qu’on ne fait pas. On ne nait pas en ayant une connaissance fine de tout, on apprend de ses erreurs !

Valérie Georges : « Quand on me dit « vous m’avez redonné le goût de vivre », je me sens récompensée de mes efforts ! »

Amoureuse de l’art de vivre à la scandinave, Valérie Georges a ouvert il y a un an, à Montgermont près de Rennes, le centre Kemijoki. Avec un pari audacieux, nous faire adopter le froid !

Valérie, peux‐tu résumer en quelques mots ce qu’est la cryothérapie ?

C’est un traitement par le froid, qui a de multiples effets sur notre santé et notre bien‐être. Le froid est un catalyseur, qui booste les ressources naturelles du corps. Les applications sont multiples : douleur chronique et aiguë, inflammation, cicatrisation, certaines maladies de peau, performance et récupération sportive, stress, anxiété, dépression, sommeil, surpoids et cellulite, anti-âge…

En créant ce centre tu avais conscience des réticences que la cryothérapie peut susciter ?

Oui ! En France la cryothérapie est encore peu connue. Pour se soigner ou se détendre on pense plutôt au chaud : une bouillotte, un bain chaud !
Ou bien on a conscience du pouvoir du froid, mais il y a des a priori et des peurs à surmonter. Mais cela fait partie de mon travail d’expliquer, de rassurer, de faire de la pédagogie, au quotidien. Une personne qui vient nous en amène environ sept autres, c’est le bouche à oreille qui fonctionne le mieux ! Je vois les regards changer peu à peu, à commencer par les professionnels de santé eux‐mêmes, les infirmières, les kinés et médecins qui sont nombreux à venir ici. Les sportifs professionnels viennent aussi de plus en plus, notamment les joueurs du Stade Rennais, pour récupérer mieux et plus vite…

Il existe d’autres centres comme celui‐ci en France ?

Il existe cinq centres de cryothérapie en France : Marseille, Montpellier, Aix‐en‐Provence, Saint‐Malo et ici à Rennes. Mais le concept Kemijoki est unique ; ici on propose une prise en charge globale de la personne, l’association de plusieurs cryotechnologies pour une meilleure efficacité. Et nous avons su potentialiser les effets du froid en les combinant avec d’autres outils, dans des protocoles développés en interne. Pour ça je me suis entourée d’une équipe de professionnels : cinq personnes aujourd’hui !

Quel a été ton parcours avant Kemijoki ?

Au départ j’ai fait des études scientifiques : j’ai étudié la micro-biologie, l’agro-alimentaire et la chimie organique. Je possède un DEA et un DUT de gestion. Ce parcours m’a permis de décrocher mon premier poste, à la Chambre de Commerce et d’Industrie des Côtes d’Armor : on demandait quelqu’un ayant des connaissances en agro‐alimentaire et en gestion.

Que faisais‐tu exactement ?

Je conseillais des porteurs de projets et j’accompagnais les projets de développement des entreprises. J’adorais mon métier, c’était à la fois passionnant et très formateur ! Je suis restée 15 ans à la CCI.

Avec cette expérience, tu devais être bien armée quand tu t’es lancée à ton tour ; cela s’est fait à quel moment ?

Oui, je peux dire que quand j’ai lancé Kemijoki, je connaissais plutôt bien le parcours qui s’impose, et les aides… A force d’accompagner des futurs chefs d’entreprise, j’ai eu envie de me lancer moi aussi, c’est devenu pour moi un impératif ! J’avais une image préconçue de la création d’entreprise, je me disais : « c’est plus dur que de reprendre ». Alors au début, j’ai cherché à reprendre une entreprise. Mais ça ne marchait pas, je ne trouvais pas… Quitter la CCI, cela m’a pris du temps.

Comment as‐tu trouvé l’idée de Kemijoki ?

Je me suis dit : « pose‐toi ». J’ai fait un bilan de compétences. J’ai fait un travail sur moi, en me disant : « Qu’est‐ce qui me fait vibrer, vraiment ? ». Au bout de plusieurs mois, cela a été une évidence : d’une part je n’étais pas faite pour reprendre, mais pour créer, car mon moteur, c’est la création, et d’autre part, j’étais faite pour l’humain, et je voulais que cela soit dans le domaine de la santé ou du bien‐être. Et je voulais innover ! L’idée en fait est venue de mon intérêt pour l’art de vivre « à la nordique ». En m’imprégnant de cette culture et en cherchant ses « secrets » de santé et de bien-être, j’ai découvert la thérapie par le froid, et là j’ai su que c’était pour moi !

Qu’est‐ce qui te plait dans cette culture ?

La Scandinavie pour moi c’est le souhait de vivre sainement et en accord avec la nature. Un style de vie qui intègre l’harmonie entre le corps et l’esprit, la pratique du sport, l’art de la détente et de la relaxation… depuis des millénaires ! C’est aussi un certain art de vivre : le confort, le design, le respect (de tout et de tous), la simplicité et le sens civique… Des valeurs authentiques et une culture où le bien-être est associé à des gestes simples, en respect avec la nature et la personne.

Qu’est‐ce que Kemijoki a de différent des autres centres de cryothérapie ?

D’abord je dois dire que la notion d’équilibre de vie a été mon fil conducteur quand j’ai créé Kemijoki. Quatre ans avant de quitter la CCI, j’ai fait un master en gestion des émotions. Je suis convaincue que nos émotions ont un lien avec nos maux. J’ai voulu créer un endroit qui offre une prise en charge globale et personnalisée. Pour potentialiser les effets de la cryothérapie, nous associons les conseils d’une diététicienne, d’un ostéopathe, d’une esthéticienne ; on peut être accompagné aussi avec l’hypnose… La prise de poids et la douleur par exemple sont souvent liées aux émotions, on doit parfois travailler les deux aspects en même temps.

Dans la cryothérapie du corps entier, la température descend à ‐110°, c’est bien ça ?

Oui, mais seulement pendant 3 mn, sous la conduite et la surveillance d’un cryothérapeute ! Et cela ne se fait pas brutalement, il y a des paliers. C’est impressionnant au début, il y a un petit stress, une appréhension de l’inconnu en fait. En général, à la 3e séance, il y a un déclic, les gens « entrent » dans l’univers de la cryothérapie. Au bout de la 7e séance, les gens sont « accros » ! Après la séance il y a un effet de bien‐être, car le sang est saturé en endorphine (les molécules du bonheur !), comme si on avait fait un footing de deux heures.

Au‐delà du spectaculaire, les effets sur des pathologies très invalidantes, ‐ cela va des migraines à la sclérose en plaques – sont impressionnants. Pour la spondylarthrite ankylosante, par exemple, au bout de 20 séances, la douleur a pratiquement disparu et cela peu durer un an.

Tout le monde peut venir chez Kemijoki ?

Il peut y avoir des contre‐indications, aussi on a d’abord un premier rendez‐vous avec un praticien de santé gratuit et obligatoire. Ensuite on propose un traitement sur-mesure, soit quelques séances, soit des cures, plus ou moins longues. On peut faire aussi une cure de découverte.

As‐tu profité des aides à la création d’entreprise pour monter ton projet ?

Bien sûr ! J’ai fait appel aux dispositifs existants et je me suis fait accompagner par la CCI de Rennes, c’était une nécessité. J’ai bénéficié du label « Entreprise innovante ». J’ai été accompagnée par Presol (prêts solidaires en Ille‐et‐Vilaine), le Club des créateurs d’entreprises, Rennes Initiatives…

Comment s’est passé l’installation dans ce local de Montgermont ?

Kemijoki est ouvert depuis le 14 novembre 2014, cela fait un an. J’avais trouvé ce grand local dans la zone de Décoparc, mais tout était à faire ! J’ai piloté l’intégralité des travaux, les appels d’offre de tout le chantier.

Côté décoration, on fait ici un bout de voyage dans les pays nordiques… Tu as fait appel à un professionnel ?

Non, mais j’avais une idée bien précise de l’ambiance que je voulais recréer. Avec l’équipe, nous avons tout fait nous‐mêmes, en nous inspirant du style scandinave. Tout est blanc avec du bois pour le côté naturel, avec une lumière douce bleutée… Pour créer une atmosphère reposante et lumineuse.

Et les tableaux qui sont sur les murs ?

Ce sont des oeuvres de peintres ou photographes, que nous exposons pendant plusieurs mois. Comme par exemple celles de Sophie Latron, complètement en harmonie avec ce lieu, avec des tons chauds, autour du thème de la nature.

Comment gères‐tu ta communication ?

D’abord, je soigne l’image de mon entreprise et la mienne, bien sûr elle doit être chaleureuse ! J’aimerais avoir plus de temps pour m’occuper de ma communication et parler de nos bons résultats, de la satisfaction des gens qui viennent ici, et que je constate chaque jour ! Nous utilisons les réseaux sociaux, facebook principalement. On est sponsor d’une manifestation de golf… Et les mois derniers, suite à un article de l’AFP, la presse a fini par parler de nous, mais cela a mis du temps !

Qu’est‐ce qui est le plus difficile pour toi ?

La création de Kemijoki m’a demandé beaucoup d’énergie et de sacrifice. Ici j’ai voulu que ce soit ouvert du lundi au samedi inclus, et de 8 h à 20 h. Et le dimanche il y a le nettoyage de la machine à faire ! Mon équilibre coté vie privée a été un peu perturbé.

Que conseilles‐tu aux femmes de Bretagne ?

De se faire aider ! Dans les dispositifs d’aide il y a des parrains, qui sont de bons conseils. Il faut se faire encadrer, soutenir là où on en a besoin. Et participer à des clubs de chefs d’entreprise, c’est important !

Tu fais partie d’un réseau d’entrepreneurs ?

Oui, Dynamic 35, Presol, Club des créateurs, et Femmes de Bretagne ! J’ai moi‐même animé beaucoup de réseaux de chefs d’entreprise, mais c’était dans les Côtes d’Armor… Quand je me suis installée en Ille‐et‐Vilaine (d’où je suis originaire), j’ai dû repartir de zéro et me reconstituer un réseau. C’est capital mais pas toujours simple de trouver le temps de participer aux rencontres ! Et puis j’élève seule mes deux enfants, qui ont besoin de moi aussi ! Je peux dire que j’ai été noyée pendant les six premiers mois du lancement de Kemijoki, mais cela va mieux. J’ai sorti la tête de l’eau !

Pour finir Valérie, qu’est‐ce qui te donne le plus de satisfaction aujourd’hui dans ton travail ?

Mes plus grandes joies sont celles que j’ai partagées avec les personnes souffrant de pathologies lourdes ou de douleurs chroniques depuis des années, et pour lesquels nous avons des résultats incroyables. Lorsque les gens nous disent « vous m’avez redonné le goût de vivre » ou « vous vous rendez compte, ça fait 17 ans que je n’ai pas été comme ça, sans douleurs », là je me sens comblée et récompensée de mes efforts.

Thierry Noëllec, médiateur : « Je n’ai jamais compris la xénophobie »

Thierry Noëllec a fait de l’art de résoudre (ou mieux ! prévenir) les conflits, son métier. Toutes les entreprises sont concernées, y compris les Femmes de Bretagne, lorsqu’elles décident de travailler ensemble. Alors autant ne pas attendre pour bien s’entendre !

Thierry, quel a été votre parcours avant de devenir médiateur ?

Après mes études (à quinze ans j’ai fait l’école hôtelière), je suis parti travailler aux Etats-Unis, pendant quatre ans. Au Texas, puis au Colorado. A Aspen, une station de ski fréquentée par les stars et les millionnaires, on allait faire à manger chez les gens, genre « Chef at Home »… Je suis rentré en France, en 1987, et j’ai été pendant quinze ans directeur de golf, à Blois, puis en Alsace.

Vous ne souhaitiez pas continuer dans le domaine de la restauration ?

Non, je n’ai vraiment pas étudié la cuisine par vocation ! Ce qui me plaisait quand je suis parti faire l’école hôtelière, c’est qu’elle se trouvait à Clermont Ferrand, loin de chez moi, et que j’y étais en pension ! Je ne rentrais à la maison que pour les vacances, à Auray…

Quelles études vous auraient plu ?

A 15 ans, je voulais être journaliste. Je l’ai dit à mes parents, qui m’en ont dissuadé… Du moins c’est le souvenir que j’en ai ! J’aimais déjà écrire, je voulais voyager, mais surtout je voulais quitter l’univers dans lequel j’avais grandi. Pendant ces années où j’étais directeur de golf, j’ai entrepris une psychanalyse, qui a duré de longues années. Et en 2002, après m’être formé à ce métier à Genève, je me suis installé à mon tour comme psychanalyste, à Mulhouse.

Que vous a apporté la psychanalyse, à commencer par la vôtre ?

Elle m’a guéri de mon mal de vivre. Je  n’allais pas bien et il était devenu impérieux pour moi d’aller chercher des réponses, en me faisant aider d’un professionnel. A cette époque, les thérapies brèves ne fleurissaient pas comme aujourd’hui. Les gens oublient que la démarche qui nous amène à nous transformer, demande un investissement, du temps, beaucoup de courage. On ne change pas en un coup de baguette magique ! Il faut du temps pour intégrer en soi les changements. C’est un chemin difficile mais libérateur !

Vous aimiez votre métier de psychanalyste ?

Oui, j’ai exercé pendant cinq ans, et cela marchait bien pour moi, je faisais aussi des conférences… La nature humaine est passionnante mais l’ennui a fini par me rattraper, et un jour, en 2007, j’ai saisi une occasion de partir travailler à l’étranger. On m’a donné 24 heures pour répondre à cette proposition !

Laquelle ?

On m’a proposé un poste de directeur à Luba, en Guinée Equatoriale, d’une plate-forme pétrolière d’une centaine de personnes. Je gérais une « base vie »,  entre l’hôtel et la pension de famille… Il y avait des gens de toutes nationalités et de conditions différentes. Nous n’étions que deux Français. Sur cette plate-forme pétrolière, l’isolement peut être difficile à vivre. Certains restaient des mois sans voir leur famille. Les femmes et l’alcool y étaient interdits ! Je devais m’occuper d’eux, veiller à ce qu’ils ne manquent de rien…

Quel changement par rapport au cabinet feutré du psy ! En même temps votre connaissance de la nature humaine a dû vous être utile pour faire vivre ensemble tous ces hommes ?

Oui, c’était un poste de directeur avec toutes les responsabilités que cela implique, mais le vrai challenge était de préserver de bonnes relations entre ces hommes vivant en vase clos, coupé du reste du monde. Ce qui veut dire être à l’écoute des besoins des uns et des autres, être diplomate. J’ai beaucoup aimé ce travail. En fait j’étais déjà dans un rôle de médiateur. L’anglais et l’espagnol (la langue du pays), étaient les deux langues utilisées pour communiquer.

Ce qui vous avait manqué avec la psychanalyse, c’est la vie au sein d’un groupe, les relations même complexes, au sein d’un groupe ?

Oui, j’ai beaucoup appris grâce à la psychanalyse. Mais là où je me sens à ma place, c’est aussi dans l’action et dans la médiation. Etre capable de rétablir le dialogue ou faire que des gens que tout oppose se parlent, se rapprochent !

C’est pour devenir médiateur que vous êtes rentré en France ?

Oui et non ! Je n’ai pas choisi de mettre un terme à cette expérience ! Pour des raisons obscures tenant à la politique du pays, j’ai été obligé de quitter le territoire du jour au lendemain, comme d’autres français, pour notre sécurité. Je n’ai même pas pu prévenir mes proches, la famille et les amis que je m’étais faits pendant toutes ces années. J’ai dû tout laisser là-bas, et suis rentré sans un sou en poche, et sans droit au chômage. J’avais 56 ans…

Cette cassure brutale a dû être très dure…

Oui. Je suis retourné vivre dans ma famille, à Auray. Sans indemnités ni ressources, je n’avais pas d’autres choix que de me battre. J’ai réfléchi et réalisé que mes expériences passées m’avaient préparé à ce rôle de médiateur, et que je m’y sentais bien !  J’ai fait une formation de six mois à Paris, et je me suis lancé.

Quelle qualité faut-il pour être un bon médiateur ?

Je dirais simplement que c’est… le « goût des autres » ! J’emprunte cette formule à ce film d’Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, plein de sensibilité. Cela me parle… De l’intérêt, et de l’empathie pour les autres. Et puis l’expérience de la vie !

Le métier de médiateur est peu connu, à quoi l’attribuez-vous ?

En France il est peu connu (sauf peut-être en Alsace), contrairement à  la Suisse ou l’Allemagne. En France, on n’a pas vraiment une culture de la médiation. On peut le voir au niveau des syndicats, on est plutôt dans une logique d’affrontement systématique, alors qu’ailleurs en Europe, on va d’abord privilégier le dialogue pour sortir d’une crise ou l’éviter. C’est pareil avec la justice. Les tribunaux sont saturés de dossiers à traiter. Le recours plus fréquent aux médiateurs permettrait de faire des économies de temps et d’argent. Au Prud’hommes par exemple, qui traitent les conflits dans l’entreprise, quelle que soit la taille du dossier et l’importance du conflit, on est obligé de faire appel à quatre juges et un greffier !

Quelle est la différence entre médiation et conciliation ?

Le  mot « médiateur » est parfois utilisé un peu abusivement. Le médiateur ne fait jamais de conciliation (en France en tout cas, contrairement aux Etats-Unis). Il règle des litiges : on n’est pas d’accord mais on peut se parler. Le médiateur utilise la maïeutique : c’est-à-dire que la résolution du conflit doit émerger des protagonistes. Le médiateur va agir et guider des entretiens – avec tout son savoir faire ! – pour que les personnes qui s’opposent en arrivent à faire émerger une solution qui vient d’elles. Dans la conciliation, on doit se débrouiller pour trouver une solution intermédiaire, quitte à l’imposer aux différentes parties. C’est une solution moins satisfaisante pour moi !

Dans quels domaines intervenez-vous ?

J’interviens aussi bien pour les petites que pour les grosses entreprises, (certaines grosses entreprises disposent de  leur propre médiateur en interne, comme France 3, Bouygues, l’Apec, l’Ursaff, mais c’est rare). Je fais aussi de la médiation judiciaire à la demande d’un juge, avec une association, l’AMBO. Les choses sont en train de changer en faveur de la médiation. La loi sur la médiation dans les litiges de la consommation, par exemple, dit maintenant qu’avant d’arriver devant un, juge, on doit prouver qu’on a essayé d’autres méthodes, médiation ou conciliation. C’est tout de même un progrès !

Dans quels cas et de quelle manière pouvez-vous aider les créateurs d’entreprise, les indépendants ?

Le développement des micro-entreprises, de l’auto-entreprenariat, qui facilite l’accès a l’emploi, augmente aussi les possibilités de conflits, car on oublie parfois de cadrer les choses, de faire signer des contrats… Idem, avec le recours au CESU (Chèque emploi service), qui nous donne un statut d’employeur auquel on n’est pas toujours préparé.  Le conflit peut porter sur la rémunération, le résultat, les conditions du travail… Au lieu d’aller jusqu’au procès parce qu’on ne peut se mettre d’accord, on  devrait penser au médiateur ! Je travaille aussi avec les TPE et les travailleurs indépendants qui s’associent pour travailler ensemble, afin de prévenir les conflits. Pour cela, j’ai mis au point une méthode simple et utile.

On aimerait en savoir plus !

Imaginons deux femmes qui sont amies dans la vie ou qui ont de bonnes relations, et qui décident de s’associer. Le risque de conflit, plus ou moins sérieux, est là, puisque cela fait partie de la nature humaine, et qu’en plus on mêle l’affectif et le travail.  Et l’injonction : « Il faut qu’on se parle », quand ça va mal, ne marche pas ! Le processus que je propose comprend trois outils, présentés en deux entretiens de deux heures environ. On se revoit six mois après la mise en place de ce « contrat » et de ces outils. C’est de la prévention des différends. Si on le veut vraiment, on peut travailler ensemble en préservant une amitié !

Vous semblez très actif dans divers réseaux…

Oui, je suis très « réseaux » ! Je fais partie du réseau lorientais Networking, de BNI, de l’Institut français de la médiation, de l’AMBO (Association des médiateurs de Bretagne Ouest), de la Société des Médiateurs Français.

Qu’est-ce que vous aimez dans la vie ?

Les différences ! Je n’ai jamais compris la xénophobie, je suis un vrai « xénophile » ! J’aime Lorient, qui est une ville rugueuse, et j’aime la poésie du rugueux. J’aime ses pylônes électriques ! J’aime la musique contemporaine et Game of Thrones… J’aime écrire. Cela fait longtemps que j’écris ; de la fiction, du polar, de préférence des choses « non publiables », et non publiées ! J’en suis à mon 7e roman ! C’est à ça, et à mon blog, sur la médiation, que je consacre mes temps libres. Et j’aime mon travail !

Ludovic Simon, fondateur de Do You Buzz : « Je crois en l’intelligence collective »

Ludovic Simon, créateur de DoYouBuzz, est à l’origine de nombreux événements autour du web et des start up, qui ont fait de Nantes un haut lieu du numérique. Il partage avec nous, sans langue de bois, son expérience de l’entreprise et ses rêves…

Ludovic, comment est né DoYouBuzz ?

DoYouBuzz est né d’abord d’une forte envie de ma part de participer à l’aventure du web 2.0 ! J’ai fait mes études après l’éclatement de la bulle internet (2001), à une période où le web se reconstruisait… J’ai eu très tôt envie de participer à ce mouvement qui a fait naître Wikipédia, Facebook et tout un tas de start up. En 2006, je travaillais dans un des principaux médias internet, une entreprise de plus de cent personnes, dans laquelle j’avais du mal à m’épanouir. Même si on était dans l’univers très stimulant du web, c’était malgré tout une entreprise classique, très « pyramidale »… J’étais passionné par le web, j’avais plein d’idées et j’étais débordant d’énergie, mais j’étais au bas de l’échelle. Alors mes idées, la direction s’en fichait !

Quel âge aviez-vous ?

J’avais 25 ans. J’ai donc refait mon CV, mais avec l’envie d’innover, de me démarquer ! J’ai utilisé mes compétences en graphisme et développement de sites web et ce que j’ai obtenu a plu à tout le monde. Avec une mise en page soignée et originale et ce format web, interactif, je n’ai eu que des compliments. C’était comme un site vitrine, très clair, bien mieux qu’un CV Word ! Tous mes amis m’ont dit « Je veux le même » ! Alors je me suis dit : « cette idée est géniale ». Il existait déjà des CV en ligne, mais dont le look n’était pas travaillé, pas attrayant.

Comment avez-vous acquis vos connaissances en multimédia et programmation ? Quelles études aviez-vous suivies ?

J’ai fait un master I en communication et médias à Nantes (SciencesCom) et un master II en école d’ingénieur à Angers (ISTIA). J’aime apprendre et j’ai eu la chance de grandir avec beaucoup de livres autour de moi. Mon goût pour internet et l’informatique a fait que j’ai énormément appris tout seul, sur mon ordinateur, grâce aux tutoriels, et en « bricolant » dans mon coin. Donc l’essentiel de mes compétences pour mon métier, je me les suis faites moi-même.

Qu’est-ce qui vous a persuadé de transformer cette idée en start up ?

J’ai creusé mon projet, notamment avec Eric Warin, le directeur de Sciences Com’, qui m’a encouragé dans cette voie. J’ai aussi validé mon idée avec d’autres sponsors du web. Mais j’ai aussi réalisé que pour que cela soit viable, il fallait créer une plate-forme attirant de nombreux utilisateurs, et que cela nécessiterait des moyens financiers conséquents… Je n’avais pas d’argent, je n’avais jamais rien vendu de ma vie… C’était enthousiasmant et effrayant !

Comment avez-vous réuni tout l’argent nécessaire ?

J’ai eu au départ 10 000 euros prêtés par ma grand-mère, ce qui m’a aidé pour obtenir plus de 200 000 euros en prêts, et aides, y compris celles de Pôle Emploi. J’ai compilé au moins huit aides nationales et régionales. Faire ces demandes de financement m’a pris en tout six mois. J’avais un gros dossier de 80 pages qui impressionnait beaucoup, même si je pense que peu de gens le lisait… J’y croyais à fond ! Avec le recul je me dis que toute cette énergie aurait pu être dépensée différemment, notamment pour chercher des clients !

Ce point de vue est intéressant ! En France, on n’est pas assez pragmatique ?

Si on compare avec les Etats-Unis par exemple, là-bas celui qui veut monter sa boîte va tout de suite à la rencontre des clients. Dans notre système, on commence par faire des Business plan et des tableaux Excel ! Il en faut, bien sûr, et d’ailleurs j’aimais faire ça ! Cela tombait bien car j’avais une peur bleue d’aller voir des clients et qu’ils me disent que ça ne les intéressait pas ! Ce qui n’est pas très logique. Maintenant, ce que je conseille aux jeunes qui se lancent, c’est d’aller se confronter au marché le plus vite possible. Autre exemple, dans mes plans j’avais prévu d’atteindre le million de visiteurs en 6 mois, alors qu’il nous aura fallu 8 ans pour ça ! J’étais donc loin du compte. DoYouBuzz vient juste de franchir le million d’utilisateurs, autrement dit rien ne s’est passé comme prévu !

Combien êtes-vous dans l’entreprise maintenant et à qui s’adressent les services de DoYouBuzz ?

Nous sommes neuf. Notre mission à DoYouBuzz c’est d’aider les gens à faire un CV dont ils soient fiers et à trouver du travail. Ils s’inscrivent gratuitement, pour le réaliser, le tester… Et on propose des options payantes, avec des outils et des avantages significatifs, sous forme d’un abonnement « Prémium », à 5 euros par mois. Une partie de nos clients sont donc les demandeurs d’emploi qui cherchent un poste salarié, mais aussi les indépendants qui ont besoin de se faire connaître. Cette partie représente la moitié de notre chiffre d’affaires.

Quelle est l’autre partie ?

Ce sont les écoles et les entreprises. On aide leurs étudiants ou leurs collaborateurs à faire leur CV. On travaille par exemple avec HEC ou l’Université de Nantes, et avec beaucoup de sociétés de services qui ont besoin de mettre en valeur l’expérience de leurs collaborateurs.

Quelles erreurs fait-on couramment quand on fait son cv ?

Faire un CV est un des exercices les plus compliqués qui soit. La grosse erreur qui est faite, c’est qu’on utilise un jargon, celui de l’entreprise ou du secteur dans lequel on a travaillé. Résultat, le recruteur ne comprend pas bien quelle a été précisément votre contribution, alors que c’est ça qui est important. Avec nos outils, on va justement aider à rendre ça clair et compréhensible. Il y a un guidage, pour simplifier la rédaction, et n’oublier aucun élément.

A travers de DoYouBuzz, qu’avez-vous appris sur la recherche d’emploi ?

Tout d’abord, que quand on est chômeur, la confiance en soi est en chute libre, au bout de quelques mois, voire quelques semaines. On peut être vite perdu. Le conseil qu’on entend le plus c’est : « Envoie ton CV à un maximum d’entreprises ». Mais c’est du temps perdu, ça ne marche pas, c’est du spam ! On entend aussi « va voir les offres », mais les petites annonces et Pôle Emploi ne représentent chacun que 7 % du stock d’emploi pourvus ! Cela n’est pas assez dit. Il faut bien comprendre que la plupart des postes qui sont pourvus n’ont pas fait l’objet d’une offre d’emploi.

Donc les postes sont pourvus à l’intérieur même de l’entreprise ? Ou par le biais du bouche à oreilles, des réseaux ?

Oui, 45 % des emplois sont pourvus après une démarche directe du chercheur d’emploi, et 25 % le sont grâce à des relations. N’oublions pas que les ¾ de l’emploi en France se trouvent dans les PME et TPE, et que ces entreprises ont rarement recours à des offres d’emploi ou à des cabinets de recrutement. Il y a là un gisement dont on ne parle pas assez ! Et le meilleur moyen d’y trouver un job est de parler directement au dirigeant, de candidater spontanément, et d’utiliser son réseau.

Les réseaux comme Femmes de Bretagne soutiennent justement la création et le développement de ces petites entreprises…

Oui, c’est pourquoi nous l’avons soutenu lors du crowfunding. J’ai assisté à des tas de conférences autour du recrutement et des Ressources Humaines, et très souvent les débats concernaient les grandes entreprises, les cadres, l’informatique… Il y a un tas de métiers, de secteurs d’activités et donc de personnes qui sont délaissés par ces événements. Quant aux cabinets de recrutement, ils s’occupent beaucoup des commerciaux ou des développeurs informatiques… Mais l’emploi ne se trouve pas que là, on marche sur la tête ! »

De quoi auraient besoin les demandeurs d’emploi ?

De plus d’accompagnement et de considération. On parle des discriminations liées à la race ou au sexe, mais pas de celles qui concernent les chômeurs. Et pourtant, une grande partie des recruteurs aujourd’hui, si vous leur dites que vous êtes chômeur, ils pensent que vous n’êtes pas « bon » ! Comment s’en sortir alors ? C’est un terrible cercle vicieux. Le chômage est un des sujets les moins bien traités qui soit. Hier DoYouBuzz co-organisait le Forum RH à Nantes, et on a parlé de ces discriminations liées au chômage.

Avez-vous mis en place des actions concrètes s’adressant spécifiquement aux demandeurs d’emploi ?

Oui, à DoYouBuzz, en plus de notre service de création de CV, nous avons démarré des « ateliers CV ». Déjà, il faut consacrer les vingt premières minutes à redonner le moral aux gens ! On est dans un système où tout participe au pessimisme ! L’idée, c’est de se remotiver et d’apprendre à mieux se vendre. La tactique pour trouver du travail consiste à cibler ses recherches. Il ne faut pas répondre à des offres, mais s’intéresser à une entreprise et essayer de comprendre ses besoins, pour se positionner comme quelqu’un qui va apporter des solutions.
Pour vous donner un exemple, la moitié des candidatures que je reçois, de la part des gens qui postulent pour travailler chez DoYouBuzz, ne sont pas des CV DoYouBuzz ! C’est à dire que la moitié ne se sont pas vraiment intéressés à l’entreprise. Et ils ne réalisent pas l’importance de prêter intérêt à la personne qui les reçoit, à son activité.

Vous-même au cours de vos études, vous a-t-on inculqué ces notions ?

Non. Dans les écoles de commerce ou de communication, le fait de s’intéresser sincèrement aux problèmes de la personne qui est en face n’est pas enseigné. Moi-même, pendant 6 ans, en voulant développer commercialement mon entreprise, j’ai fait le « vendeur de tapis » avec ma belle plaquette et mon beau costume ! On apprend aux commerciaux à passer cent coups de fil pour avoir dix rendez-vous, et sur ces dix rendez-vous, faire une ou deux ventes. C’est une perte de temps ! Maintenant, à DoYouBuzz, on procède différemment, on n’essaye pas de se vendre à tout prix, on s’intéresse aux problèmes du client. C’est ça qui marche : l’empathie, la bienveillance, car elles créent naturellement du lien, dans la vraie vie comme dans le monde des affaires.

Qu’est-ce qui vous a fait évoluer dans ce sens, personnellement et pour l’entreprise ?

Il y a cinq ans, mon entreprise a commencé à avoir des difficultés, et est même passée pas loin du précipice. Cela m’a fait me remettre en question. J’ai lu le livre Liberté et Cie, de Brian M. Carney et Isaac Getz, sur l’entreprise libérée. Une révélation pour moi ! Je me suis aperçu que j’étais devenu un petit chef, pas de la pire espèce, mais un petit chef quand même… Le pouvoir agit de façon bizarre sur l’ego… J’avais quitté mon entreprise précédente car je lui reprochais d’être trop pyramidale, et en fait je commençais à reproduire les mêmes erreurs. J’ai compris qu’avec l’entreprise libérée, une autre posture est possible pour le manager. Il peut être un leader nourricier, un jardinier, qui arrose les plantes plutôt que de tirer sur les feuilles ! Et c’est beaucoup plus agréable !

Qu’est-ce qui change concrètement dans l’entreprise libérée ?

Dans l’entreprise libérée, tout est basée sur la confiance et non le contrôle. Il n’y a plus de hiérarchie. On discute tous ensemble, car un groupe se trompe moins qu’une personne. Personne ne peut vous obliger à faire quelque chose. Cela demande plus de subtilité que dans un système hiérarchique classique. Il faut être dans l’écoute et dans la transparence, communiquer avec ses collègues.

Economiquement, les résultats sont là ?

Oui, nous on a « sweetché » il y a 18 mois, avec des résultats très encourageants. On prend moins de mauvaises décisions, car tous ensemble on est plus intelligents ! C’est vraiment un grand enseignement pour moi.

Pour un chef d’entreprise, cela doit exiger une vraie transformation… Comment les salariés de l’entreprise ont vécu ce changement de leur côté ?

Cela a été un changement important pour toute l’équipe. Chacun est plus responsable, plus adulte. On est amenés à s’engager plus, on est plus motivés. Les actionnaires de l’entreprise, qui sont des chefs d’entreprise, sont plus sceptiques mais ils respectent notre mode d’organisation et notre culture. Dans le système traditionnel, le patron est la personne clé, et lui-même pense que s’il n’est pas là, tout part « en vrille ». C’est la pensée dominante dans l’économie. L’autre changement majeur, c’est de faire passer les besoins du client avant toute chose, y compris les objectifs de vente.

Vous êtes un des créateurs du Forum RH à Nantes, qui réunit des chefs d’entreprise et des professionnels de l’emploi. Dans les conférences que vous tenez, vous parlez de l’entreprise libérée ?

Oui, lors de ces forums (et aussi lors des petits déjeuners RH qui ont lieu chaque mois), on témoigne de notre propre expérience, et on y réfléchit sur les nouvelles pratiques managériales et organisationnelles. Pendant des années, j’ai assisté à des tas de conférences ayant pour thème : « Le logiciel x », « Comment recruter des talents », « Ma marque employeur est-ce qu’elle est bonne ? » Mais le sujet n’était jamais : « Comment être heureux au travail ? Comment bien travailler ensemble ? ». Les choses changent heureusement !

Parlons maintenant des nombreux événements autour du numérique que vous avez créés à Nantes. On peut parler d’une vraie success story !

Pour moi c’est une chance ! En 2008, un an après la création de ma boite, j’ai vu qu’il n’y avait pas d’événements dans le domaine du web et des start up. J’ai donc décidé d’en créé un, et cela a été un énorme succès. Plein de monde voulait parler startup et web. J’ai donc créé une association, avec deux copains, Atlantic 2.0, qui a maintenant six salariés, un budget annuel de 1 millions d’euros et qui rassemble un réseau de 270 entreprises. Jean-Marc Ayrault, maire de Nantes à l’époque, nous a beaucoup soutenus. En 2010, nous avons créé la Cantine numérique de Nantes, un espace de co-working qui depuis a fait des petits ! On a ensuite monté le Web2Day, qui est maintenant le plus grand événement web en France, la dernière édition a rassemblé 6000 personnes en 3 jours.

Quelles sont vos envies pour les années à venir ?

J’ai de plus en plus d’engagements dans le domaine de l’entreprise libérée mais aussi de l’économie sociale et solidaire et de l’écologie. J’adore échanger, transmettre, et apprendre… Je veux continuer à le faire !

Sentez-vous autour de vous une vraie curiosité autour de ce thème de l’entreprise libérée, du bonheur au travail ?

Je suis débordé de demandes en ce sens ! Je suis très sollicité pour témoigner sur ces sujets. Les gens ont envie de changement et en ont marre de l’organisation hiérarchique des entreprises. Surtout les nouvelles générations ! Pour eux ça ne passe pas.

Quels conseils auriez-vous envie de donner à celles et ceux qui ont envie de créer leur entreprise ?

Quand on crée, aller le plus vite possible à la rencontre de ses clients. Et pour progresser, savoir se remettre en question. Je leur recommande aussi de se faire connaître via DoYouBuzz. J’ai moi-même remis à jour mon CV tout récemment et ça m’a permis de refaire le point sur mes contributions et mes aspirations ! Cela peut vraiment aider les indépendants à se faire connaître et à vendre leurs services. Sur notre blog il y a des exemples et des témoignages, à découvrir !

Isabelle Brunet, « Il est primordial d’être bien entouré pour entreprendre »

Isabelle Brunet a créé il y a deux ans IB Graphiste dans son village des Côtes d’Armor. Sous ses airs discrets se cache une pro de la com’, qui met son dynamisme au service de son entreprise mais aussi de la vie locale…

Isabelle, dans quel domaine as-tu travaillé avant de créer IB Graphiste ?

Dans la pub et le marketing, pendant 24 ans. Notamment dans une agence de conseil en communication à Paris, pendant 18 ans. C’était une petite structure, plutôt familiale (il y avait le patron, sa femme et nous étions deux graphistes), mais à l’activité intense. Le travail était passionnant mais le rythme était effréné, avec de nombreuses soirées « charrette » (heures supplémentaires pour envoyer dans les temps un document au client ou à l’imprimerie).

Cette période a été formatrice pour toi ?

Oui, l’avantage des petites structures c’est que c’est très formateur, chacun doit être polyvalent et prendre des initiatives. On est nécessairement appelé à être autonome et réactif. J’avais un contact direct avec les clients, ne serait-ce que par téléphone. Dans les grosses agences tout est beaucoup plus cloisonné. C’était varié, on ne s’ennuyait pas ! On faisait toutes sortes de documents imprimés, du webdesign, du packaging…

Tu avais fait des études dans ce domaine ?

Oui, j’ai un BTS en communication et actions publicitaires, que j’ai complété par une formation professionnelle en arts appliqués.

Qu’est-ce qui t’as poussé à quitter ta vie parisienne ?

Avec mon mari et nos deux enfants, nous voulions venir nous installer en Bretagne. Pour la qualité de vie, parce que nous y avons plein de souvenirs d’enfance, et parce que nos parents vivent maintenant à Dinard et Saint-Cast. Et je rêvais d’une longère… dans les Côtes d’Armor ! J’ai parlé de ce projet à mon employeur et lui ai proposé de travailler à distance, en télétravail. C’était un premier pas vers l’indépendance… Mon patron était ok, puis au dernier moment il n’a plus voulu. Cela lui a fait un peu peur… On a trouvé un accord et il m’a licencié à l’amiable. On a quand même déménagé.

Tu avais le projet de te mettre à ton compte ?

Oui, j’en avais envie mais mon mari travaillait aussi en indépendant, et cela me faisait peur qu’aucun de nous deux ne soit salarié… Alors j’ai travaillé comme graphiste à Loudéac, dans une entreprise de vente par correspondance dans l’agroalimentaire (Vital Concept), pendant 5 ans, puis 3 ans 1/2 chez Mafart à Saint-Brieuc (chauffage-sanitaire-plomberie). Puis j’ai été licenciée économique…

Entre temps, l’envie d’être indépendante avait mûri. Je me suis mise à y réfléchir sérieusement, mais tout en cherchant un poste de salarié… J’ai alors consulté un cabinet de reclassement, et c’est là qu’on m’a dit : « Bon, il est temps de savoir ce que vous voulez faire ! Vous cherchez un poste ou vous voulez monter votre entreprise ? ! »

Cela t’a aidé qu’on te pousse à choisir à ce moment-là ?

Oui, j’ai alors pris conscience de mes propres freins… J’en ai discuté avec ma conseillère Pôle Emploi qui m’a proposé un dispositif d’accompagnement pendant 3 mois : l’OPCRE (Objectif Projet Création ou Reprise d’Entreprise). Pour  vérifier la cohérence et construire mon projet de création. J’ai donc été accompagnée par la Boutique de Gestion (BGE) pour élaborer l’étude commerciale, établir les éléments financiers, choisir mon statut juridique, élaborer un plan d’action en définissant les étapes… Cela a été très utile. J’ai ensuite demandé la moitié de mon capital restant à Pôle Emploi. Il me restait un an de chômage, j’ai donc reçu l’équivalent de 6 mois d’allocations pour me lancer, un sacré coup de pouce (dispositif ARCE) ! J’ai également bénéficié de l’aide à la création d’entreprise de mon ancien employeur dans le cadre de mon CSP (Contrat de Sécurisation Professionnelle).

Quel statut as-tu choisi pour ta société ?

J’ai monté IB Graphiste en août 2014 en tant qu’auto-entrepreneur, statut que j’ai conservé pour l’instant car je le trouve très simple côté administratif.

As-tu eu aussi besoin de te former dans ton domaine ?

Oui, j’ai fait une formation pour me perfectionner dans la conception de site internet, notamment en webdesign et pour créer des sites personnalisés sous WordPress.

Quelles prestations proposes-tu avec IB Graphiste ?

Je conçois et réalise tout support de communication aussi bien imprimés que web, de A à Z. Je suis créatrice d’identité visuelle : une charte graphique, un logo… Je fais aussi de la formation aux logiciels PAO : Photoshop, InDesign, Illustrator mais aussi à Gimp et Scribus (version libres et gratuites) et des initiations à WordPress (pour faire des blogs ou sites « vitrine »).

Depuis que tu t’es mise à ton compte, qu’est-ce qui a évolué dans ton travail ?

La part de plus en plus grande prise par la publicité « en ligne ». Maintenant, quand on est graphiste, il faut savoir utiliser le web aussi bien que le « print ». Aujourd’hui presque tout le monde a le réflexe de faire une recherche sur Internet pour avoir des infos sur une entreprise ! Donc il faut orienter ses clients dans ce sens. En plus de mon travail de graphiste, je suis amenée à répondre aux multiples questions que les clients se posent à ce sujet.

Quel conseil donnes-tu à tes clients pour se faire connaître ?

Je conseille un mix de pub à travers des flyers, une plaquette, etc ; et une présence sur le web. C’est impératif, via un site Internet. Une présence sur les réseaux sociaux (Facebook, google+, Twitter) est en plus fortement conseillé, pas pour faire des ventes directes mais pour faire un lien vers son site. De plus cela aide aussi au référencement.

Mais être présent sur les réseaux sociaux ou avoir un blog ne convient pas forcément à tout le monde… Non, cela dépend des tempéraments et aussi des domaines d’activités… Faire sa communication prend aussi beaucoup de temps. Beaucoup d’entreprises qui ont un blog n’ont pas le temps d’écrire des articles. Dans ce cas là, mieux vaut ne pas en avoir que de le laisser inactif, ou alors faire appel à quelqu’un de spécialisé !

Et pour toi comment procèdes-tu ?

Je fais de la veille dans mon domaine, et j’utilise beaucoup Facebook, Twitter et Google + (un peu moins). Cette compétence fait que de plus en plus, des clients me demandent de faire vivre leur page Facebook ; donc j’ai aussi parfois une activité de Community Manager. C’est intéressant, mais il faut être prudent avec les infos que l’on met dans une page pro. Si quelqu’un se plaint d’un produit et met des commentaires négatifs à un article, il faut répondre de façon positive et ne pas laisser ça en suspens, car il en va de la réputation de l’entreprise.

Qu’est-ce que tu aimes dans ton travail ?

J’aime le contact avec le client, et même l’aspect « accompagnement » ! Quand un client fait appel à moi, c’est rare qu’il ait une idée précise de ce qu’il veut, et qu’il sache bien présenter son activité. Je l’invite à se poser ces questions : « à qui je m’adresse ou à qui j’aimerais vendre ? », ou « quels sont les produits que je vends ? » Je les aide à trouver ce qui les différencie des autres… quelquefois je fais un peu de psychologie !

Je n’habite pas toujours à côté de mes clients, mais j’essaye de me déplacer au moins lors de la première rencontre, c’est important. Je passe 1 heure ou 2 avec le client pour bien comprendre son métier et ses attentes.

Qu’est-ce qui est le plus compliqué pour toi ?

Les entreprises ne se rendent pas toujours compte que j’ai besoin d’informations, de « matière » ! Pour créer une plaquette ou un site internet par exemple… Même si je peux aider à rédiger des textes ou faire des photos, il y a des données sur l’entreprise que je ne peux inventer moi-même. Alors il faut aller à la pêche aux infos !

Selon toi quel est l’intérêt de faire appel à un indépendant plutôt qu’à une grosse agence ?

Pour ma part, je dirais que c’est ma proximité avec le client. Je suis son unique interlocuteur et mon but est de lui proposer quelque chose qui « colle » vraiment à sa personnalité, ses envies. Pour cela il faut vraiment être à l’écoute. Une cliente (qui démarrait son entreprise) s’est justement tournée vers moi parce qu’ailleurs on avait voulu lui imposer une charte graphique qui ne lui correspondait pas. On l’avait aussi incitée à changer le nom qu’elle avait choisi pour son entreprise. Il faut certes conseiller mais respecter aussi les goûts et la sensibilité du client. Un juste milieu pas toujours simple à trouver.

Tu aimes t’occuper des créateurs d’entreprise ?

Oui, surtout quand on me confie la création du logo ! Dernièrement, j’ai passé beaucoup de temps avec un jeune chef d’entreprise, avec lequel je suis allée au fond des choses, pour trouver pourquoi ce nom résonnait en lui… Au final mon client s’est « retrouvé » dans le logo que j’ai créé, alors j’ai atteint mon but ! Les gens qui lancent leur activité y mettent beaucoup de cœur, c’est un peu leur « bébé », alors je ne peux pas les décevoir.

Beaucoup n’ont pas vraiment prévu de budget pour leur communication…

Non, et souvent les gens commencent par faire par eux-mêmes… Mais au bout de quelques temps ils se tournent vers un pro quand ils réalisent que c’est un métier, et qu’il vaut mieux faire confiance à un professionnel qui a les codes pour communiquer.

Qu’as-tu appris depuis que tu as démarré, sur tes méthodes de travail ?

J’ai appris entre autres à bien cadrer mon travail, en amont, lors du devis, pour éviter tout malentendu car certaines personnes ne réalisent pas que si elles changent d’avis à plusieurs reprises concernant leurs textes (le contenu, la longueur), cela bouscule la mise en page.

Autre exemple, pour les logos, on se met d’accord sur un nombre de propositions (en général, je propose trois projets). Je ne fais jamais le même devis, je le personnalise. Certains n’ont pas trop de budget ou alors il y a le cas des associations. J’essaye de faire un tarif pas trop élevé, ou alors d’adapter le temps que je passe…

Tu as ton bureau chez toi… Comment fais-tu la séparation vie professionnelle et vie familiale ?

Je commence ma journée quand mon mari part travailler, et je m’arrête quand il revient vers 19 h ! Je ne travaille pas le week-end, ni pendant mes vacances, sauf s’il y a urgence. Avec ces horaires ma vie de famille est préservée ! Travailler chez moi me permet aussi d’être disponible en cas de besoin pour mes deux enfants de 14 et 18 ans (comme prendre la voiture pour les conduire quelque part !).

Je crois que tu aimes bien les réseaux…

Oui, les réseaux sont super importants ! Pour moi, c’est l’entraide, l’échange d’infos… Je suis assez active dans le Club des Créateurs et Repreneurs d’Entreprise du 22 (CCRE22), sur Dinan et Lamballe, où on échange sur nos domaines d’activités et les problématiques des créateurs d’entreprises. Et il y a le CBC22 (Club Bretagne Communication) à Saint-Brieuc. C’est un Club de communicants : des responsables de com’ en collectivités, des graphistes, etc. Et je fais aussi partie de Femmes de Bretagne ! Je ne suis pas très « commerciale », alors grâce à tous ces réseaux j’ai fait beaucoup de rencontres.

Que t’as apporté le réseau Femmes de Bretagne ?

J’ai participé à plusieurs rencontres organisées par Karelle Ranson, à Pleudihen-sur-Rance et à Dinan, qui ont initié de belles collaborations du côté Nord Bretagne ! J’y ai rencontré des femmes des environs, et certaines comme Anne Chaumont (Up’Cycling France) et Cécile Mugler (Les Peintures Malouinières) sont devenues des clientes avec lesquelles j’ai collaboré sur plusieurs projets. Et j’aime aussi de temps en temps répondre à un « coup de pouce » ou accueillir les nouvelles sur le site.

Quel conseil aurais-tu envie de donner à celles et ceux qui aimeraient se lancer en indépendant ?

D’oser aller vers les autres, même si ce n’est pas facile, pour ne pas être seul. Intégrer un ou plusieurs réseaux, favoriser le partenariat local et participer à la vie de sa commune ou de sa région, en rejoignant le monde associatif. Quand je suis arrivée dans mon village de Saint-Esprit des Bois (Plédéliac), je ne connaissais personne, mais peu à peu j’ai trouvé ma place ! Le bénévolat m’y a énormément aidé. Je fais partie de plusieurs associations et j’en ai même créé une :  « Lentcho ».  Les membres actifs ont entre 14 et 45 ans, c’est une association inter-générationnelle. Nous organisons des évènements culturels et festifs (concerts, contes, salons, spectacles de cirque…) depuis un an, en Côtes d’Armor.

Je pense qu’il est primordial d’être bien entouré pour avoir confiance et croire en soi. J’ai eu la chance d’avoir les encouragements de mon mari, mes amis et ma famille. Au départ, je n’étais pas du tout sûre de moi. Mais j’ai pris confiance peu à peu en devenant indépendante !

Adeline Faure-Chognard : « Je veux former au métier de couturière des femmes vouées à celui d’exciseuse »

Adeline Faure-Chognard, créatrice de la marque Entre Deux Rives Afc, est de celles qui mettent de la passion dans tout ce qu’elles entreprennent. Depuis trois ans à Saint-Malo, elle regarde vers l’Afrique pour créer des ponts entre les cultures. Avec elle, la mode n’est pas que frivole, elle est aussi engagée !

Comment es-tu arrivée à la couture ?
A neuf ans, j’ai commencé la broderie… Et depuis le collège, j’avais deux envies : la couture ou le journalisme ! Après un bac général économique et social, j’ai voulu faire un DUT journalisme, mais il n’y avait que 25 places par établissement, pour 1500 demandes, et je n’ai pas été prise… Il y avait bien d’autres écoles, mais elles étaient payantes, et à ce moment-là mes parents n’avaient pas les moyens de m’aider à payer mes études. Je me suis alors inscrite à Rennes en fac d’histoire. Mais une grève a commencé qui a duré 1 mois et demi… Pour moi qui voulais rentrer dans une formation hyper sélective comme celle du DUT journalisme, c’était me fermer toutes les portes. J’ai préféré changer d’orientation.

Quelle voie as-tu pris alors ?
J’ai arrêté la fac et j’ai fait des petits boulots. J’ai travaillé dans une laiterie, en usine, j’ai fait des inventaires, etc. Le B.A.BA de l’intérim… Puis j’ai repris le chemin des études et, à la rentrée suivante, je me suis inscrite en BEP tailleur homme à Valence. Je l’ai fait en un an.

Pourquoi t’être spécialisée tout de suite en couture homme ?
Je voulais acquérir un savoir faire artisanal, en apprenant ce qu’il y a de plus compliqué dans le domaine de la couture ! (j’aime aller vers ce qui est compliqué.) Le vestiaire homme est ce qu’il y a de plus difficile à réaliser. Cela ne pardonne pas : dans un costume homme, s’il y a un défaut, cela se voit tout de suite. Pas de place pour l’approximation ! Après ce BEP, j’ai poursuivi à Brest avec un BTS Industrie des matériaux souples (les textiles), spécialité modélisme. Là il s’agissait essentiellement de couture femme.

Tout ça t’a donné une formation assez complète en couture… Avais-tu déjà une idée de ce que tu voulais faire après tes études ?
Oui et non, je savais déjà que je voulais travailler en tant qu’indépendante, et que les tissus africains allaient jouer un grand rôle dans mon univers créatif, et que je travaillerai avec l’Afrique. D’ailleurs, dès la première année de mes études en 2004, j’ai réalisé une chemise « métissée », qui a été remarquée et que je porte toujours.

Les vêtements que tu crées mêlent toujours la mode occidentale et africaine, d’où te vient ce goût pour l’Afrique ?
L’Afrique fait partie de mes gênes, mon nom, « Faure » est lié à l’Afrique ! Je viens d’une famille de pasteurs protestants installés depuis bien longtemps là-bas. Mon arrière-arrière grand-père, Félix Faure, dans ce contexte colonial a œuvré pour des projets humanistes, avec Albert Schweitzer notamment…

Et toi, as-tu grandi en Afrique aussi ?
Non, j’ai grandi en France, et j’ai visité le Togo et le Sénégal récemment. Mais ces deux voyages sont venus confirmer mon attirance pour ce continent et cette culture. Et mon goût de l’aventure…

Revenons un peu à ton parcours Adeline, qu’as-tu fait après avoir terminé tes études de couture ?
J’ai travaillé chez Sabena Technics, à l’aéroport de Dinard, dans un atelier de sellerie où je cousais pour « habiller » les avions (des sièges, des rideaux, de la moquette…) Ce fut très formateur. Je travaillais surtout avec des hommes, et j’aimais l’ambiance de cet atelier ! En 2009, je suis partie découvrir l’Afrique et le Togo. Au retour, c’était la crise, je ne trouvais pas de travail dans la couture. J’ai décidé de me former dans un domaine qui recrute : la cuisine ! Dans la région où j’habite (Saint-Malo), il y avait de la demande… J’ai fait une formation de cuisinière avec l’AFPA.

Face à la difficulté, tu n’as pas peur de prendre de grands virages ! Mais la cuisine, ça te plaisait ?
Oui, car il y a plein de passerelles entre la cuisine et la couture : dans les deux domaines, si l’on veut être bon, il faut savoir se renouveler, jouer avec les formes et les textures, être organisé et surtout rapide ! Des qualités que j’avais déjà travaillé grâce à la couture, alors la restauration, je m’y sentais assez à l’aise !

Tu as travaillé combien de temps comme cuisinière ?
J’ai fait pendant deux ans des extras en cuisine, à Saint-Malo. Puis je me suis offert un grand voyage de plusieurs mois en Inde…

Ta curiosité et ta soif de voyages ont-elles été comblées ?
Oui ! Je voulais un voyage de détente, mais aussi découvrir les richesses de ce pays et je l’ai fait à travers les tissus, l’ornementation, l’accessoire, la broderie… et aussi la cuisine ! J’ai beaucoup aimé. A mon retour, j’ai trouvé du travail aux Thermes Marins, un établissement prestigieux de Saint-Malo. J’étais très contente ! Mais quatre jours avant de débuter, j’ai été renversée par une voiture et je me suis faite une entorse au genou qui m’a obligée à déclarer forfait.

Tu as dû être déçue ! ?
Je me suis dit que c’était un signe, et que je devais retourner vers ma première voie ! J’ai trouvé un emploi de modéliste patronnière chez La fiancée du Mékong (marque de vêtements féminins née à Saint-Malo inspirée par l’Asie). J’ai travaillé dans le bureau d’études et de développement des collections. Je faisais ce que j’aime : dessiner, réaliser des patrons. J’avais des week-end de trois jours, alors peu à peu, j’ai commencé à créer mes propres vêtements, et je me suis lancée. J’ai créé Entre deux rives Afc en 2012.

Ton style est très original, qui mèle les coupes occidentales assez strictes, (on voit ta formation de tailleur), et les tissus africains comme le wax (tissu traditionnel à l’origine enduit de cire), très coloré. Comment travailles-tu ?
Je fais tout moi-même, de A à Z, et une partie du travail est faite à la main. Certains manteaux nécessitent trente heures de travail. Les tissus que j’emploie comme le drap de laine pour les manteaux ont aussi un coût. Ma marque se situe sur du haut de gamme. Depuis la création d’Entre deux rives Afc, j’ai énormément travaillé. J’ai un tempérament de battante, mais c’est parfois difficile, car il me reste peu de temps et d’argent pour gérer la partie commerciale et me faire connaître. J’aurais besoin d’aide !

Où peut-on voir et acheter tes créations ?
Les créations sont essentiellement visibles sur Facebook (page Entre deux rives Afc), sur le site internet entredeuxrives-afc.com (même s’il n’est pas du tout à jour). Et bien sûr directement à l’atelier, à Saint-Malo et un peu partout en Bretagne et sur la région parisienne lorsque je fais des salons et autres événements (magasins éphémères, etc).

Est-ce que les Africains sont sensibles à tes créations ?
Ils sont séduits car ce mélange correspond à leurs goûts actuels. La mode africaine est en pleine ébullition, et chez les Africains il y a un regain d’intérêt pour les costumes et les tissus traditionnels de leurs parents. Depuis vingt ans, les Africains portaient de moins en moins de wax. Depuis cinq ou dix ans, la tendance s’inverse : de jeunes créateurs africains se réapproprient le costume traditionnel. Ce que je fais leur parle beaucoup ! J’ai participé à des salons de mode africaine à Paris où ma marque a été très appréciée. Ici on a peu conscience de ce dynamisme de l’Afrique, pourtant c’est un continent plein de vitalité et de créativité.

Tu as participé aussi à des salons de créateurs en Bretagne ou ailleurs ?
Bien sûr, je suis très active ! En plus d’événements autour de la mode africaine à Paris, j’étais au Forum des Arts en 2014, au salon « Toute fibre dehors » à la Gacilly, et bien sûr aux Journées européennes des métiers d’art, à Dol et Saint-Malo. Mais ça ne suffit pas… Actuellement, je suis en pleine recherche de soutien et financements, car j’ai un nouveau projet pour faire vivre mon entreprise différemment, la renforcer et l’ouvrir à de nouveaux partenariats. Et j’ai aussi envie de travailler avec des femmes.

Alors parle-nous de ce projet !
L’idée est de m’entourer de couturières africaines pour réaliser mes collections, tout en soutenant concrètement une cause qui m’est chère depuis longtemps : la lutte contre l’excision. Je souhaite former au métier de couturière des jeunes femmes normalement vouées au métier d’exciseuse. En Afrique de l’Ouest, ce sont souvent les mères ou les tantes qui forment leurs filles ou nièces à ces pratiques. Dans certaines zones, comme au Mali, en Côte d’Ivoire ou au Sénégal, il s’agit presque d’une caste avec un statut privilégié. Pour qu’elles arrêtent, il faut leur proposer un revenu et une situation de remplacement honorable pour elles. Je peux les former en quatre mois et faire repartir ma société, tout en leur versant un revenu.

C’est une idée très intelligente et très généreuse de ta part, car ces femmes sont souvent perçues comme des bourreaux. Ton projet pourrait aider beaucoup de femmes. Tu as des partenaires pour cela ?
Je suis en contact avec des ONG qui luttent contre ce fléau en France et en Afrique : le collectif « Excision parlons-en », la Fédération nationale GAMS… Grâce à l’ONG internationale le CIAF, j’ai rencontré à Dakar le Coseprat, qui fait un travail de terrain énorme pour éduquer la population et avec qui je travaillerai. Le projet se situe à Guédiawaye, en banlieue de Dakar, où je me suis rendue en mai dernier pour rencontrer les jeunes exciseuses que je vais reconvertir à partir du mois d’octobre – si tout se passe bien…

De combien as-tu besoin pour rendre possible ce projet ?
Il me faut réunir 20 000 euros pour lancer l’atelier. Et 30 000 euros supplémentaires pour former pendant quatre mois les futures couturières. J’ai envoyé quinze demandes de subventions auprès de la Ville, du département, de la Région. Et je prépare en ce moment les patrons sur lesquels nous travaillerons.

As-tu pensé à d’autres façons de faire connaître Entre deux rives et soutenir ton action ?
Je recherche aussi des égéries… Une personnalité, africaine ou européenne, qui porterait mes créations et serait une ambassadrice de ma marque. J’ai été contactée par la chanteuse de rap sénégalaise, Sister Fa, très active dans la lutte contre l’excision. J’ai aussi rencontré à Dakar Laura Flessel, la chanteuse Inna Modja, qui étaient emballées par mon projet.

Tu n’as pas peur et tu sais frapper aux portes, c’est un bon point pour toi ! C’est un trait de ta personnalité ?
Oui, au collège déjà, j’avais écrit au ministre de l’éducation nationale, pour demander un local à vélo ! Plus récemment et sérieusement, j’ai envoyé à Fleur Pellerin quelques vêtements de mes collections. Avant qu’elle ne soit ministre de la culture, elle m’avait encouragée et félicitée. Hélas je n’ai pas encore reçu de retour. Mais je continue d’aller de l’avant pour faire la promotion de mon travail, il le faut !

Photos Marie-Hélène Siran