Valérie Georges : « Quand on me dit « vous m’avez redonné le goût de vivre », je me sens récompensée de mes efforts ! »

Amoureuse de l’art de vivre à la scandinave, Valérie Georges a ouvert il y a un an, à Montgermont près de Rennes, le centre Kemijoki. Avec un pari audacieux, nous faire adopter le froid !

Valérie, peux‐tu résumer en quelques mots ce qu’est la cryothérapie ?

C’est un traitement par le froid, qui a de multiples effets sur notre santé et notre bien‐être. Le froid est un catalyseur, qui booste les ressources naturelles du corps. Les applications sont multiples : douleur chronique et aiguë, inflammation, cicatrisation, certaines maladies de peau, performance et récupération sportive, stress, anxiété, dépression, sommeil, surpoids et cellulite, anti-âge…

En créant ce centre tu avais conscience des réticences que la cryothérapie peut susciter ?

Oui ! En France la cryothérapie est encore peu connue. Pour se soigner ou se détendre on pense plutôt au chaud : une bouillotte, un bain chaud !
Ou bien on a conscience du pouvoir du froid, mais il y a des a priori et des peurs à surmonter. Mais cela fait partie de mon travail d’expliquer, de rassurer, de faire de la pédagogie, au quotidien. Une personne qui vient nous en amène environ sept autres, c’est le bouche à oreille qui fonctionne le mieux ! Je vois les regards changer peu à peu, à commencer par les professionnels de santé eux‐mêmes, les infirmières, les kinés et médecins qui sont nombreux à venir ici. Les sportifs professionnels viennent aussi de plus en plus, notamment les joueurs du Stade Rennais, pour récupérer mieux et plus vite…

Il existe d’autres centres comme celui‐ci en France ?

Il existe cinq centres de cryothérapie en France : Marseille, Montpellier, Aix‐en‐Provence, Saint‐Malo et ici à Rennes. Mais le concept Kemijoki est unique ; ici on propose une prise en charge globale de la personne, l’association de plusieurs cryotechnologies pour une meilleure efficacité. Et nous avons su potentialiser les effets du froid en les combinant avec d’autres outils, dans des protocoles développés en interne. Pour ça je me suis entourée d’une équipe de professionnels : cinq personnes aujourd’hui !

Quel a été ton parcours avant Kemijoki ?

Au départ j’ai fait des études scientifiques : j’ai étudié la micro-biologie, l’agro-alimentaire et la chimie organique. Je possède un DEA et un DUT de gestion. Ce parcours m’a permis de décrocher mon premier poste, à la Chambre de Commerce et d’Industrie des Côtes d’Armor : on demandait quelqu’un ayant des connaissances en agro‐alimentaire et en gestion.

Que faisais‐tu exactement ?

Je conseillais des porteurs de projets et j’accompagnais les projets de développement des entreprises. J’adorais mon métier, c’était à la fois passionnant et très formateur ! Je suis restée 15 ans à la CCI.

Avec cette expérience, tu devais être bien armée quand tu t’es lancée à ton tour ; cela s’est fait à quel moment ?

Oui, je peux dire que quand j’ai lancé Kemijoki, je connaissais plutôt bien le parcours qui s’impose, et les aides… A force d’accompagner des futurs chefs d’entreprise, j’ai eu envie de me lancer moi aussi, c’est devenu pour moi un impératif ! J’avais une image préconçue de la création d’entreprise, je me disais : « c’est plus dur que de reprendre ». Alors au début, j’ai cherché à reprendre une entreprise. Mais ça ne marchait pas, je ne trouvais pas… Quitter la CCI, cela m’a pris du temps.

Comment as‐tu trouvé l’idée de Kemijoki ?

Je me suis dit : « pose‐toi ». J’ai fait un bilan de compétences. J’ai fait un travail sur moi, en me disant : « Qu’est‐ce qui me fait vibrer, vraiment ? ». Au bout de plusieurs mois, cela a été une évidence : d’une part je n’étais pas faite pour reprendre, mais pour créer, car mon moteur, c’est la création, et d’autre part, j’étais faite pour l’humain, et je voulais que cela soit dans le domaine de la santé ou du bien‐être. Et je voulais innover ! L’idée en fait est venue de mon intérêt pour l’art de vivre « à la nordique ». En m’imprégnant de cette culture et en cherchant ses « secrets » de santé et de bien-être, j’ai découvert la thérapie par le froid, et là j’ai su que c’était pour moi !

Qu’est‐ce qui te plait dans cette culture ?

La Scandinavie pour moi c’est le souhait de vivre sainement et en accord avec la nature. Un style de vie qui intègre l’harmonie entre le corps et l’esprit, la pratique du sport, l’art de la détente et de la relaxation… depuis des millénaires ! C’est aussi un certain art de vivre : le confort, le design, le respect (de tout et de tous), la simplicité et le sens civique… Des valeurs authentiques et une culture où le bien-être est associé à des gestes simples, en respect avec la nature et la personne.

Qu’est‐ce que Kemijoki a de différent des autres centres de cryothérapie ?

D’abord je dois dire que la notion d’équilibre de vie a été mon fil conducteur quand j’ai créé Kemijoki. Quatre ans avant de quitter la CCI, j’ai fait un master en gestion des émotions. Je suis convaincue que nos émotions ont un lien avec nos maux. J’ai voulu créer un endroit qui offre une prise en charge globale et personnalisée. Pour potentialiser les effets de la cryothérapie, nous associons les conseils d’une diététicienne, d’un ostéopathe, d’une esthéticienne ; on peut être accompagné aussi avec l’hypnose… La prise de poids et la douleur par exemple sont souvent liées aux émotions, on doit parfois travailler les deux aspects en même temps.

Dans la cryothérapie du corps entier, la température descend à ‐110°, c’est bien ça ?

Oui, mais seulement pendant 3 mn, sous la conduite et la surveillance d’un cryothérapeute ! Et cela ne se fait pas brutalement, il y a des paliers. C’est impressionnant au début, il y a un petit stress, une appréhension de l’inconnu en fait. En général, à la 3e séance, il y a un déclic, les gens « entrent » dans l’univers de la cryothérapie. Au bout de la 7e séance, les gens sont « accros » ! Après la séance il y a un effet de bien‐être, car le sang est saturé en endorphine (les molécules du bonheur !), comme si on avait fait un footing de deux heures.

Au‐delà du spectaculaire, les effets sur des pathologies très invalidantes, ‐ cela va des migraines à la sclérose en plaques – sont impressionnants. Pour la spondylarthrite ankylosante, par exemple, au bout de 20 séances, la douleur a pratiquement disparu et cela peu durer un an.

Tout le monde peut venir chez Kemijoki ?

Il peut y avoir des contre‐indications, aussi on a d’abord un premier rendez‐vous avec un praticien de santé gratuit et obligatoire. Ensuite on propose un traitement sur-mesure, soit quelques séances, soit des cures, plus ou moins longues. On peut faire aussi une cure de découverte.

As‐tu profité des aides à la création d’entreprise pour monter ton projet ?

Bien sûr ! J’ai fait appel aux dispositifs existants et je me suis fait accompagner par la CCI de Rennes, c’était une nécessité. J’ai bénéficié du label « Entreprise innovante ». J’ai été accompagnée par Presol (prêts solidaires en Ille‐et‐Vilaine), le Club des créateurs d’entreprises, Rennes Initiatives…

Comment s’est passé l’installation dans ce local de Montgermont ?

Kemijoki est ouvert depuis le 14 novembre 2014, cela fait un an. J’avais trouvé ce grand local dans la zone de Décoparc, mais tout était à faire ! J’ai piloté l’intégralité des travaux, les appels d’offre de tout le chantier.

Côté décoration, on fait ici un bout de voyage dans les pays nordiques… Tu as fait appel à un professionnel ?

Non, mais j’avais une idée bien précise de l’ambiance que je voulais recréer. Avec l’équipe, nous avons tout fait nous‐mêmes, en nous inspirant du style scandinave. Tout est blanc avec du bois pour le côté naturel, avec une lumière douce bleutée… Pour créer une atmosphère reposante et lumineuse.

Et les tableaux qui sont sur les murs ?

Ce sont des oeuvres de peintres ou photographes, que nous exposons pendant plusieurs mois. Comme par exemple celles de Sophie Latron, complètement en harmonie avec ce lieu, avec des tons chauds, autour du thème de la nature.

Comment gères‐tu ta communication ?

D’abord, je soigne l’image de mon entreprise et la mienne, bien sûr elle doit être chaleureuse ! J’aimerais avoir plus de temps pour m’occuper de ma communication et parler de nos bons résultats, de la satisfaction des gens qui viennent ici, et que je constate chaque jour ! Nous utilisons les réseaux sociaux, facebook principalement. On est sponsor d’une manifestation de golf… Et les mois derniers, suite à un article de l’AFP, la presse a fini par parler de nous, mais cela a mis du temps !

Qu’est‐ce qui est le plus difficile pour toi ?

La création de Kemijoki m’a demandé beaucoup d’énergie et de sacrifice. Ici j’ai voulu que ce soit ouvert du lundi au samedi inclus, et de 8 h à 20 h. Et le dimanche il y a le nettoyage de la machine à faire ! Mon équilibre coté vie privée a été un peu perturbé.

Que conseilles‐tu aux femmes de Bretagne ?

De se faire aider ! Dans les dispositifs d’aide il y a des parrains, qui sont de bons conseils. Il faut se faire encadrer, soutenir là où on en a besoin. Et participer à des clubs de chefs d’entreprise, c’est important !

Tu fais partie d’un réseau d’entrepreneurs ?

Oui, Dynamic 35, Presol, Club des créateurs, et Femmes de Bretagne ! J’ai moi‐même animé beaucoup de réseaux de chefs d’entreprise, mais c’était dans les Côtes d’Armor… Quand je me suis installée en Ille‐et‐Vilaine (d’où je suis originaire), j’ai dû repartir de zéro et me reconstituer un réseau. C’est capital mais pas toujours simple de trouver le temps de participer aux rencontres ! Et puis j’élève seule mes deux enfants, qui ont besoin de moi aussi ! Je peux dire que j’ai été noyée pendant les six premiers mois du lancement de Kemijoki, mais cela va mieux. J’ai sorti la tête de l’eau !

Pour finir Valérie, qu’est‐ce qui te donne le plus de satisfaction aujourd’hui dans ton travail ?

Mes plus grandes joies sont celles que j’ai partagées avec les personnes souffrant de pathologies lourdes ou de douleurs chroniques depuis des années, et pour lesquels nous avons des résultats incroyables. Lorsque les gens nous disent « vous m’avez redonné le goût de vivre » ou « vous vous rendez compte, ça fait 17 ans que je n’ai pas été comme ça, sans douleurs », là je me sens comblée et récompensée de mes efforts.

Isabelle Brunet, « Il est primordial d’être bien entouré pour entreprendre »

Isabelle Brunet a créé il y a deux ans IB Graphiste dans son village des Côtes d’Armor. Sous ses airs discrets se cache une pro de la com’, qui met son dynamisme au service de son entreprise mais aussi de la vie locale…

Isabelle, dans quel domaine as-tu travaillé avant de créer IB Graphiste ?

Dans la pub et le marketing, pendant 24 ans. Notamment dans une agence de conseil en communication à Paris, pendant 18 ans. C’était une petite structure, plutôt familiale (il y avait le patron, sa femme et nous étions deux graphistes), mais à l’activité intense. Le travail était passionnant mais le rythme était effréné, avec de nombreuses soirées « charrette » (heures supplémentaires pour envoyer dans les temps un document au client ou à l’imprimerie).

Cette période a été formatrice pour toi ?

Oui, l’avantage des petites structures c’est que c’est très formateur, chacun doit être polyvalent et prendre des initiatives. On est nécessairement appelé à être autonome et réactif. J’avais un contact direct avec les clients, ne serait-ce que par téléphone. Dans les grosses agences tout est beaucoup plus cloisonné. C’était varié, on ne s’ennuyait pas ! On faisait toutes sortes de documents imprimés, du webdesign, du packaging…

Tu avais fait des études dans ce domaine ?

Oui, j’ai un BTS en communication et actions publicitaires, que j’ai complété par une formation professionnelle en arts appliqués.

Qu’est-ce qui t’as poussé à quitter ta vie parisienne ?

Avec mon mari et nos deux enfants, nous voulions venir nous installer en Bretagne. Pour la qualité de vie, parce que nous y avons plein de souvenirs d’enfance, et parce que nos parents vivent maintenant à Dinard et Saint-Cast. Et je rêvais d’une longère… dans les Côtes d’Armor ! J’ai parlé de ce projet à mon employeur et lui ai proposé de travailler à distance, en télétravail. C’était un premier pas vers l’indépendance… Mon patron était ok, puis au dernier moment il n’a plus voulu. Cela lui a fait un peu peur… On a trouvé un accord et il m’a licencié à l’amiable. On a quand même déménagé.

Tu avais le projet de te mettre à ton compte ?

Oui, j’en avais envie mais mon mari travaillait aussi en indépendant, et cela me faisait peur qu’aucun de nous deux ne soit salarié… Alors j’ai travaillé comme graphiste à Loudéac, dans une entreprise de vente par correspondance dans l’agroalimentaire (Vital Concept), pendant 5 ans, puis 3 ans 1/2 chez Mafart à Saint-Brieuc (chauffage-sanitaire-plomberie). Puis j’ai été licenciée économique…

Entre temps, l’envie d’être indépendante avait mûri. Je me suis mise à y réfléchir sérieusement, mais tout en cherchant un poste de salarié… J’ai alors consulté un cabinet de reclassement, et c’est là qu’on m’a dit : « Bon, il est temps de savoir ce que vous voulez faire ! Vous cherchez un poste ou vous voulez monter votre entreprise ? ! »

Cela t’a aidé qu’on te pousse à choisir à ce moment-là ?

Oui, j’ai alors pris conscience de mes propres freins… J’en ai discuté avec ma conseillère Pôle Emploi qui m’a proposé un dispositif d’accompagnement pendant 3 mois : l’OPCRE (Objectif Projet Création ou Reprise d’Entreprise). Pour  vérifier la cohérence et construire mon projet de création. J’ai donc été accompagnée par la Boutique de Gestion (BGE) pour élaborer l’étude commerciale, établir les éléments financiers, choisir mon statut juridique, élaborer un plan d’action en définissant les étapes… Cela a été très utile. J’ai ensuite demandé la moitié de mon capital restant à Pôle Emploi. Il me restait un an de chômage, j’ai donc reçu l’équivalent de 6 mois d’allocations pour me lancer, un sacré coup de pouce (dispositif ARCE) ! J’ai également bénéficié de l’aide à la création d’entreprise de mon ancien employeur dans le cadre de mon CSP (Contrat de Sécurisation Professionnelle).

Quel statut as-tu choisi pour ta société ?

J’ai monté IB Graphiste en août 2014 en tant qu’auto-entrepreneur, statut que j’ai conservé pour l’instant car je le trouve très simple côté administratif.

As-tu eu aussi besoin de te former dans ton domaine ?

Oui, j’ai fait une formation pour me perfectionner dans la conception de site internet, notamment en webdesign et pour créer des sites personnalisés sous WordPress.

Quelles prestations proposes-tu avec IB Graphiste ?

Je conçois et réalise tout support de communication aussi bien imprimés que web, de A à Z. Je suis créatrice d’identité visuelle : une charte graphique, un logo… Je fais aussi de la formation aux logiciels PAO : Photoshop, InDesign, Illustrator mais aussi à Gimp et Scribus (version libres et gratuites) et des initiations à WordPress (pour faire des blogs ou sites « vitrine »).

Depuis que tu t’es mise à ton compte, qu’est-ce qui a évolué dans ton travail ?

La part de plus en plus grande prise par la publicité « en ligne ». Maintenant, quand on est graphiste, il faut savoir utiliser le web aussi bien que le « print ». Aujourd’hui presque tout le monde a le réflexe de faire une recherche sur Internet pour avoir des infos sur une entreprise ! Donc il faut orienter ses clients dans ce sens. En plus de mon travail de graphiste, je suis amenée à répondre aux multiples questions que les clients se posent à ce sujet.

Quel conseil donnes-tu à tes clients pour se faire connaître ?

Je conseille un mix de pub à travers des flyers, une plaquette, etc ; et une présence sur le web. C’est impératif, via un site Internet. Une présence sur les réseaux sociaux (Facebook, google+, Twitter) est en plus fortement conseillé, pas pour faire des ventes directes mais pour faire un lien vers son site. De plus cela aide aussi au référencement.

Mais être présent sur les réseaux sociaux ou avoir un blog ne convient pas forcément à tout le monde… Non, cela dépend des tempéraments et aussi des domaines d’activités… Faire sa communication prend aussi beaucoup de temps. Beaucoup d’entreprises qui ont un blog n’ont pas le temps d’écrire des articles. Dans ce cas là, mieux vaut ne pas en avoir que de le laisser inactif, ou alors faire appel à quelqu’un de spécialisé !

Et pour toi comment procèdes-tu ?

Je fais de la veille dans mon domaine, et j’utilise beaucoup Facebook, Twitter et Google + (un peu moins). Cette compétence fait que de plus en plus, des clients me demandent de faire vivre leur page Facebook ; donc j’ai aussi parfois une activité de Community Manager. C’est intéressant, mais il faut être prudent avec les infos que l’on met dans une page pro. Si quelqu’un se plaint d’un produit et met des commentaires négatifs à un article, il faut répondre de façon positive et ne pas laisser ça en suspens, car il en va de la réputation de l’entreprise.

Qu’est-ce que tu aimes dans ton travail ?

J’aime le contact avec le client, et même l’aspect « accompagnement » ! Quand un client fait appel à moi, c’est rare qu’il ait une idée précise de ce qu’il veut, et qu’il sache bien présenter son activité. Je l’invite à se poser ces questions : « à qui je m’adresse ou à qui j’aimerais vendre ? », ou « quels sont les produits que je vends ? » Je les aide à trouver ce qui les différencie des autres… quelquefois je fais un peu de psychologie !

Je n’habite pas toujours à côté de mes clients, mais j’essaye de me déplacer au moins lors de la première rencontre, c’est important. Je passe 1 heure ou 2 avec le client pour bien comprendre son métier et ses attentes.

Qu’est-ce qui est le plus compliqué pour toi ?

Les entreprises ne se rendent pas toujours compte que j’ai besoin d’informations, de « matière » ! Pour créer une plaquette ou un site internet par exemple… Même si je peux aider à rédiger des textes ou faire des photos, il y a des données sur l’entreprise que je ne peux inventer moi-même. Alors il faut aller à la pêche aux infos !

Selon toi quel est l’intérêt de faire appel à un indépendant plutôt qu’à une grosse agence ?

Pour ma part, je dirais que c’est ma proximité avec le client. Je suis son unique interlocuteur et mon but est de lui proposer quelque chose qui « colle » vraiment à sa personnalité, ses envies. Pour cela il faut vraiment être à l’écoute. Une cliente (qui démarrait son entreprise) s’est justement tournée vers moi parce qu’ailleurs on avait voulu lui imposer une charte graphique qui ne lui correspondait pas. On l’avait aussi incitée à changer le nom qu’elle avait choisi pour son entreprise. Il faut certes conseiller mais respecter aussi les goûts et la sensibilité du client. Un juste milieu pas toujours simple à trouver.

Tu aimes t’occuper des créateurs d’entreprise ?

Oui, surtout quand on me confie la création du logo ! Dernièrement, j’ai passé beaucoup de temps avec un jeune chef d’entreprise, avec lequel je suis allée au fond des choses, pour trouver pourquoi ce nom résonnait en lui… Au final mon client s’est « retrouvé » dans le logo que j’ai créé, alors j’ai atteint mon but ! Les gens qui lancent leur activité y mettent beaucoup de cœur, c’est un peu leur « bébé », alors je ne peux pas les décevoir.

Beaucoup n’ont pas vraiment prévu de budget pour leur communication…

Non, et souvent les gens commencent par faire par eux-mêmes… Mais au bout de quelques temps ils se tournent vers un pro quand ils réalisent que c’est un métier, et qu’il vaut mieux faire confiance à un professionnel qui a les codes pour communiquer.

Qu’as-tu appris depuis que tu as démarré, sur tes méthodes de travail ?

J’ai appris entre autres à bien cadrer mon travail, en amont, lors du devis, pour éviter tout malentendu car certaines personnes ne réalisent pas que si elles changent d’avis à plusieurs reprises concernant leurs textes (le contenu, la longueur), cela bouscule la mise en page.

Autre exemple, pour les logos, on se met d’accord sur un nombre de propositions (en général, je propose trois projets). Je ne fais jamais le même devis, je le personnalise. Certains n’ont pas trop de budget ou alors il y a le cas des associations. J’essaye de faire un tarif pas trop élevé, ou alors d’adapter le temps que je passe…

Tu as ton bureau chez toi… Comment fais-tu la séparation vie professionnelle et vie familiale ?

Je commence ma journée quand mon mari part travailler, et je m’arrête quand il revient vers 19 h ! Je ne travaille pas le week-end, ni pendant mes vacances, sauf s’il y a urgence. Avec ces horaires ma vie de famille est préservée ! Travailler chez moi me permet aussi d’être disponible en cas de besoin pour mes deux enfants de 14 et 18 ans (comme prendre la voiture pour les conduire quelque part !).

Je crois que tu aimes bien les réseaux…

Oui, les réseaux sont super importants ! Pour moi, c’est l’entraide, l’échange d’infos… Je suis assez active dans le Club des Créateurs et Repreneurs d’Entreprise du 22 (CCRE22), sur Dinan et Lamballe, où on échange sur nos domaines d’activités et les problématiques des créateurs d’entreprises. Et il y a le CBC22 (Club Bretagne Communication) à Saint-Brieuc. C’est un Club de communicants : des responsables de com’ en collectivités, des graphistes, etc. Et je fais aussi partie de Femmes de Bretagne ! Je ne suis pas très « commerciale », alors grâce à tous ces réseaux j’ai fait beaucoup de rencontres.

Que t’as apporté le réseau Femmes de Bretagne ?

J’ai participé à plusieurs rencontres organisées par Karelle Ranson, à Pleudihen-sur-Rance et à Dinan, qui ont initié de belles collaborations du côté Nord Bretagne ! J’y ai rencontré des femmes des environs, et certaines comme Anne Chaumont (Up’Cycling France) et Cécile Mugler (Les Peintures Malouinières) sont devenues des clientes avec lesquelles j’ai collaboré sur plusieurs projets. Et j’aime aussi de temps en temps répondre à un « coup de pouce » ou accueillir les nouvelles sur le site.

Quel conseil aurais-tu envie de donner à celles et ceux qui aimeraient se lancer en indépendant ?

D’oser aller vers les autres, même si ce n’est pas facile, pour ne pas être seul. Intégrer un ou plusieurs réseaux, favoriser le partenariat local et participer à la vie de sa commune ou de sa région, en rejoignant le monde associatif. Quand je suis arrivée dans mon village de Saint-Esprit des Bois (Plédéliac), je ne connaissais personne, mais peu à peu j’ai trouvé ma place ! Le bénévolat m’y a énormément aidé. Je fais partie de plusieurs associations et j’en ai même créé une :  « Lentcho ».  Les membres actifs ont entre 14 et 45 ans, c’est une association inter-générationnelle. Nous organisons des évènements culturels et festifs (concerts, contes, salons, spectacles de cirque…) depuis un an, en Côtes d’Armor.

Je pense qu’il est primordial d’être bien entouré pour avoir confiance et croire en soi. J’ai eu la chance d’avoir les encouragements de mon mari, mes amis et ma famille. Au départ, je n’étais pas du tout sûre de moi. Mais j’ai pris confiance peu à peu en devenant indépendante !

Adeline Faure-Chognard : « Je veux former au métier de couturière des femmes vouées à celui d’exciseuse »

Adeline Faure-Chognard, créatrice de la marque Entre Deux Rives Afc, est de celles qui mettent de la passion dans tout ce qu’elles entreprennent. Depuis trois ans à Saint-Malo, elle regarde vers l’Afrique pour créer des ponts entre les cultures. Avec elle, la mode n’est pas que frivole, elle est aussi engagée !

Comment es-tu arrivée à la couture ?
A neuf ans, j’ai commencé la broderie… Et depuis le collège, j’avais deux envies : la couture ou le journalisme ! Après un bac général économique et social, j’ai voulu faire un DUT journalisme, mais il n’y avait que 25 places par établissement, pour 1500 demandes, et je n’ai pas été prise… Il y avait bien d’autres écoles, mais elles étaient payantes, et à ce moment-là mes parents n’avaient pas les moyens de m’aider à payer mes études. Je me suis alors inscrite à Rennes en fac d’histoire. Mais une grève a commencé qui a duré 1 mois et demi… Pour moi qui voulais rentrer dans une formation hyper sélective comme celle du DUT journalisme, c’était me fermer toutes les portes. J’ai préféré changer d’orientation.

Quelle voie as-tu pris alors ?
J’ai arrêté la fac et j’ai fait des petits boulots. J’ai travaillé dans une laiterie, en usine, j’ai fait des inventaires, etc. Le B.A.BA de l’intérim… Puis j’ai repris le chemin des études et, à la rentrée suivante, je me suis inscrite en BEP tailleur homme à Valence. Je l’ai fait en un an.

Pourquoi t’être spécialisée tout de suite en couture homme ?
Je voulais acquérir un savoir faire artisanal, en apprenant ce qu’il y a de plus compliqué dans le domaine de la couture ! (j’aime aller vers ce qui est compliqué.) Le vestiaire homme est ce qu’il y a de plus difficile à réaliser. Cela ne pardonne pas : dans un costume homme, s’il y a un défaut, cela se voit tout de suite. Pas de place pour l’approximation ! Après ce BEP, j’ai poursuivi à Brest avec un BTS Industrie des matériaux souples (les textiles), spécialité modélisme. Là il s’agissait essentiellement de couture femme.

Tout ça t’a donné une formation assez complète en couture… Avais-tu déjà une idée de ce que tu voulais faire après tes études ?
Oui et non, je savais déjà que je voulais travailler en tant qu’indépendante, et que les tissus africains allaient jouer un grand rôle dans mon univers créatif, et que je travaillerai avec l’Afrique. D’ailleurs, dès la première année de mes études en 2004, j’ai réalisé une chemise « métissée », qui a été remarquée et que je porte toujours.

Les vêtements que tu crées mêlent toujours la mode occidentale et africaine, d’où te vient ce goût pour l’Afrique ?
L’Afrique fait partie de mes gênes, mon nom, « Faure » est lié à l’Afrique ! Je viens d’une famille de pasteurs protestants installés depuis bien longtemps là-bas. Mon arrière-arrière grand-père, Félix Faure, dans ce contexte colonial a œuvré pour des projets humanistes, avec Albert Schweitzer notamment…

Et toi, as-tu grandi en Afrique aussi ?
Non, j’ai grandi en France, et j’ai visité le Togo et le Sénégal récemment. Mais ces deux voyages sont venus confirmer mon attirance pour ce continent et cette culture. Et mon goût de l’aventure…

Revenons un peu à ton parcours Adeline, qu’as-tu fait après avoir terminé tes études de couture ?
J’ai travaillé chez Sabena Technics, à l’aéroport de Dinard, dans un atelier de sellerie où je cousais pour « habiller » les avions (des sièges, des rideaux, de la moquette…) Ce fut très formateur. Je travaillais surtout avec des hommes, et j’aimais l’ambiance de cet atelier ! En 2009, je suis partie découvrir l’Afrique et le Togo. Au retour, c’était la crise, je ne trouvais pas de travail dans la couture. J’ai décidé de me former dans un domaine qui recrute : la cuisine ! Dans la région où j’habite (Saint-Malo), il y avait de la demande… J’ai fait une formation de cuisinière avec l’AFPA.

Face à la difficulté, tu n’as pas peur de prendre de grands virages ! Mais la cuisine, ça te plaisait ?
Oui, car il y a plein de passerelles entre la cuisine et la couture : dans les deux domaines, si l’on veut être bon, il faut savoir se renouveler, jouer avec les formes et les textures, être organisé et surtout rapide ! Des qualités que j’avais déjà travaillé grâce à la couture, alors la restauration, je m’y sentais assez à l’aise !

Tu as travaillé combien de temps comme cuisinière ?
J’ai fait pendant deux ans des extras en cuisine, à Saint-Malo. Puis je me suis offert un grand voyage de plusieurs mois en Inde…

Ta curiosité et ta soif de voyages ont-elles été comblées ?
Oui ! Je voulais un voyage de détente, mais aussi découvrir les richesses de ce pays et je l’ai fait à travers les tissus, l’ornementation, l’accessoire, la broderie… et aussi la cuisine ! J’ai beaucoup aimé. A mon retour, j’ai trouvé du travail aux Thermes Marins, un établissement prestigieux de Saint-Malo. J’étais très contente ! Mais quatre jours avant de débuter, j’ai été renversée par une voiture et je me suis faite une entorse au genou qui m’a obligée à déclarer forfait.

Tu as dû être déçue ! ?
Je me suis dit que c’était un signe, et que je devais retourner vers ma première voie ! J’ai trouvé un emploi de modéliste patronnière chez La fiancée du Mékong (marque de vêtements féminins née à Saint-Malo inspirée par l’Asie). J’ai travaillé dans le bureau d’études et de développement des collections. Je faisais ce que j’aime : dessiner, réaliser des patrons. J’avais des week-end de trois jours, alors peu à peu, j’ai commencé à créer mes propres vêtements, et je me suis lancée. J’ai créé Entre deux rives Afc en 2012.

Ton style est très original, qui mèle les coupes occidentales assez strictes, (on voit ta formation de tailleur), et les tissus africains comme le wax (tissu traditionnel à l’origine enduit de cire), très coloré. Comment travailles-tu ?
Je fais tout moi-même, de A à Z, et une partie du travail est faite à la main. Certains manteaux nécessitent trente heures de travail. Les tissus que j’emploie comme le drap de laine pour les manteaux ont aussi un coût. Ma marque se situe sur du haut de gamme. Depuis la création d’Entre deux rives Afc, j’ai énormément travaillé. J’ai un tempérament de battante, mais c’est parfois difficile, car il me reste peu de temps et d’argent pour gérer la partie commerciale et me faire connaître. J’aurais besoin d’aide !

Où peut-on voir et acheter tes créations ?
Les créations sont essentiellement visibles sur Facebook (page Entre deux rives Afc), sur le site internet entredeuxrives-afc.com (même s’il n’est pas du tout à jour). Et bien sûr directement à l’atelier, à Saint-Malo et un peu partout en Bretagne et sur la région parisienne lorsque je fais des salons et autres événements (magasins éphémères, etc).

Est-ce que les Africains sont sensibles à tes créations ?
Ils sont séduits car ce mélange correspond à leurs goûts actuels. La mode africaine est en pleine ébullition, et chez les Africains il y a un regain d’intérêt pour les costumes et les tissus traditionnels de leurs parents. Depuis vingt ans, les Africains portaient de moins en moins de wax. Depuis cinq ou dix ans, la tendance s’inverse : de jeunes créateurs africains se réapproprient le costume traditionnel. Ce que je fais leur parle beaucoup ! J’ai participé à des salons de mode africaine à Paris où ma marque a été très appréciée. Ici on a peu conscience de ce dynamisme de l’Afrique, pourtant c’est un continent plein de vitalité et de créativité.

Tu as participé aussi à des salons de créateurs en Bretagne ou ailleurs ?
Bien sûr, je suis très active ! En plus d’événements autour de la mode africaine à Paris, j’étais au Forum des Arts en 2014, au salon « Toute fibre dehors » à la Gacilly, et bien sûr aux Journées européennes des métiers d’art, à Dol et Saint-Malo. Mais ça ne suffit pas… Actuellement, je suis en pleine recherche de soutien et financements, car j’ai un nouveau projet pour faire vivre mon entreprise différemment, la renforcer et l’ouvrir à de nouveaux partenariats. Et j’ai aussi envie de travailler avec des femmes.

Alors parle-nous de ce projet !
L’idée est de m’entourer de couturières africaines pour réaliser mes collections, tout en soutenant concrètement une cause qui m’est chère depuis longtemps : la lutte contre l’excision. Je souhaite former au métier de couturière des jeunes femmes normalement vouées au métier d’exciseuse. En Afrique de l’Ouest, ce sont souvent les mères ou les tantes qui forment leurs filles ou nièces à ces pratiques. Dans certaines zones, comme au Mali, en Côte d’Ivoire ou au Sénégal, il s’agit presque d’une caste avec un statut privilégié. Pour qu’elles arrêtent, il faut leur proposer un revenu et une situation de remplacement honorable pour elles. Je peux les former en quatre mois et faire repartir ma société, tout en leur versant un revenu.

C’est une idée très intelligente et très généreuse de ta part, car ces femmes sont souvent perçues comme des bourreaux. Ton projet pourrait aider beaucoup de femmes. Tu as des partenaires pour cela ?
Je suis en contact avec des ONG qui luttent contre ce fléau en France et en Afrique : le collectif « Excision parlons-en », la Fédération nationale GAMS… Grâce à l’ONG internationale le CIAF, j’ai rencontré à Dakar le Coseprat, qui fait un travail de terrain énorme pour éduquer la population et avec qui je travaillerai. Le projet se situe à Guédiawaye, en banlieue de Dakar, où je me suis rendue en mai dernier pour rencontrer les jeunes exciseuses que je vais reconvertir à partir du mois d’octobre – si tout se passe bien…

De combien as-tu besoin pour rendre possible ce projet ?
Il me faut réunir 20 000 euros pour lancer l’atelier. Et 30 000 euros supplémentaires pour former pendant quatre mois les futures couturières. J’ai envoyé quinze demandes de subventions auprès de la Ville, du département, de la Région. Et je prépare en ce moment les patrons sur lesquels nous travaillerons.

As-tu pensé à d’autres façons de faire connaître Entre deux rives et soutenir ton action ?
Je recherche aussi des égéries… Une personnalité, africaine ou européenne, qui porterait mes créations et serait une ambassadrice de ma marque. J’ai été contactée par la chanteuse de rap sénégalaise, Sister Fa, très active dans la lutte contre l’excision. J’ai aussi rencontré à Dakar Laura Flessel, la chanteuse Inna Modja, qui étaient emballées par mon projet.

Tu n’as pas peur et tu sais frapper aux portes, c’est un bon point pour toi ! C’est un trait de ta personnalité ?
Oui, au collège déjà, j’avais écrit au ministre de l’éducation nationale, pour demander un local à vélo ! Plus récemment et sérieusement, j’ai envoyé à Fleur Pellerin quelques vêtements de mes collections. Avant qu’elle ne soit ministre de la culture, elle m’avait encouragée et félicitée. Hélas je n’ai pas encore reçu de retour. Mais je continue d’aller de l’avant pour faire la promotion de mon travail, il le faut !

Photos Marie-Hélène Siran

Delphine Grimont : « Je me suis offert le plus beau bureau du monde »

A Vannes, Delphine Grimont a créé le Piano Barge – restaurant, bar à vins, café-concert – à bord d’une péniche, côté Golfe…

Delphine il y a de quoi être impressionné par Le piano Barge ! Lorsqu’on visite le site internet avant de venir, comme je l’ai fait et qu’on découvre l’état d’origine du bateau, on se dit quel projet colossal !

Oui, j’ai mis quatre années à mettre en place ce projet. Quatre années qui m’ont demandé énormément d’énergie. Il fallait être sur tous les fronts : transformer un bateau de 1900 en établissement recevant du public a été un travail énorme !

Comment t’est venue l’idée ?  Tu voulais monter un restaurant et tu as eu l’idée de l’installer sur un bateau ?
Non, pas du tout. Au départ, il y a eu un coup de cœur. C’était à Paris, sur le canal de l’Ourcq, un soir de septembre… Une péniche transformée en bar m’a tapée dans l’œil (La péniche Antipode).  Je me suis dit : ce n’est pas possible que Vannes (où je vis) n’ait pas un lieu comme cela ! Ce rêve ne m’a plus quittée : créer à Vannes, une ville que j’adore, un endroit inédit et festif, sur un bateau. Une idée germait en moi aussi depuis longtemps : être en lien avec des musiciens, organiser des concerts. Ça, c’était l’envie de départ, qui m’a poussée dans cette aventure. Et une fois qu’on est lancé, on ne peut plus reculer, surtout que le budget engagé était énorme, et que je me devais de réussir, pour ne décevoir personne, à commencer par mes créanciers !

Où as-tu trouvé le bateau ?
A Amsterdam. Il a été choisi assez rapidement. Ce n’était pas un vieux rafiot en bois à retaper, mais un campinois (une péniche de mer intérieure) en acier riveté, c’était beaucoup plus ambitieux ! Tout de suite, il a fallu mener de front le bouclage financier, ce qui a demandé beaucoup de travail, et l’aspect technique : comment transformer ce bateau de 1900  en un lieu d’accueil du public, en répondant aux normes d’accessibilité et de sécurité. Une équipe a été constituée : j’ai confié le dessin à l’architecte nantais Olivier Flahault et la direction des travaux au navigateur trinitain Dominic Vittet. Mon mari aussi a été une aide très précieuse, à tout point de vue. Les travaux ont duré trois ans, à Lorient, au chantier Timolor. C’est moi qui tenais le budget (1,6 millions d’euros), et j’intervenais dans tous les aspects.

Comment as-tu financé tous les travaux ? Tu as reçu des aides de fonds publics ?
Non, aucune, car il s’agit d’un restaurant. Je n’ai reçu aucun financement de la Région, du département ou de la Ville. Le maire de Vannes était partant et a été bienveillant dès le départ, et la Ville m’a accordée les autorisations d’installation. Mais techniquement, cela n’a pas été simple de trouver une place, et il y eu de très nombreuses difficultés administratives…  Le Piano Barge se trouve finalement à côté de l’embarcadère, en dehors de la Ville. Un pont sépare le Golfe du Morbihan de la Ville, le Piano Barge se situe côté Golfe. Et Vannes se tourne de plus en plus vers le Golfe…

Tu t’es faite aider pour le financement et le montage de ton dossier ?
Oui, par le réseau Initiatives Vannes, le réseau Entreprendre, par les Business Angels… Et une seule banque m’a suivie. Cela a été quand même le parcours du combattant pendant 2 ans ; il a fallu convaincre, présenter, raconter le projet, rencontrer beaucoup de gens. Ce que, au départ je n’avais jamais appris à faire. Mon mari a été pour cela d’une aide très précieuse. Il m’a fallu aussi trouver de l’argent auprès d’associés, et cela met une grosse pression, c’était lourd à porter. Tous ces gens qui me faisaient confiance en me prêtant de l’argent… je devais réussir. J’ai pris un risque, c’est vrai.  Dix fois le projet a failli ne pas se faire. Il y a eu des tas de « feux rouges ». Tout était compliqué ! Et pourtant cela s’est fait ! Le Piano Barge a ouvert en septembre 2013.

Ton mari était donc à tes côtés dans ce projet ?
Oui, il a toujours été très impliqué et très motivé. Il est navigateur, il a fait plusieurs Route du Rhum. Il m’a encouragée, aidée à trouver de l’argent, à faire des présentations auprès des Business Angel. Je n’aurais pas pu le faire sans lui, cela a été fondamental de savoir que je faisais cela avec quelqu’un qui m’approuvait. Il sait trouver de l’argent, convaincre, s’appuyer sur les retours. Moi au départ, j’étais du genre, « j’ai un projet, je le garde, car si ça ne se fait pas, qu’est-ce qu’on va penser de moi ! » Lui, c’est l’inverse : il en parle au maximum autour de lui, et c’est comme cela que ça marche.

Tu as combien d’employés aujourd’hui ?
Huit, dont deux apprentis. Quatre personnes en cuisine et quatre en salle. Dès le premier jour, j’ai embauché huit personnes, et c’est ça qui était impressionnant, pour moi qui n’avais jamais eu d’entreprise ! Mais il le fallait, pour le bar et le restaurant. On a une carte très courte, mais de qualité, grâce à notre chef Cyril Jorda. C’est un restaurant semi-gastronomique, mais aussi un bar et un lieu d’accueil de réunions ou séminaires.

Tu n’avais jamais travaillé dans la restauration auparavant ?
Non. J’ai su m’entourer des bonnes personnes, nous formons une vraie équipe. J’ai appris ! Le chef prend en main vraiment toutes les commandes, son expérience est fondamentale. Je me suis aussi appuyée sur les serveurs, j’ai beaucoup appris d’eux pour le service, et moi aussi j’aide et j’essuie les verres ! Ce qui est important finalement dans l’entreprise, c’est le quotidien. Je me suis offert le plus beau bureau du monde, et je me suis entourée de gens sur qui je peux m’appuyer.

Dans quel domaine avais-tu évolué avant le Piano Barge ?
J’ai travaillé comme assistante de production pendant quinze ans à France 3. J’ai collaboré à la météo et à l’agenda culturel. Cela m’a donné l’envie profonde, quand je faisais ce travail, de me tourner vers les arts vivants. Et finalement, je me retrouve à la tête d’un restaurant…

Oui, justement, nous n’avons pas encore parlé des concerts de jazz que tu organises…
Et bien, actuellement, on est un peu entre deux eaux. Le Piano Barge a été lancé avec la volonté d’organiser des concerts, et pour cela une association a été montée, afin de prétendre à du mécénat. Et il y en a eu beaucoup. Grâce à cela, il y a eu des concerts fantastiques, ce qui a contribué à la renommée du Piano Barge. L’idée était belle : favoriser la création artistique, offrir aux artistes les meilleures conditions possibles pour travailler, mais le modèle économique n’était pas tenable, trop ambitieux. Ce n’était pas mon initiative. Cela a duré 18 mois… Avec une programmation plus simple, et des artistes locaux, l’association serait rentrée dans ses frais. Et là ça n’a pas été le cas.

Alors le Piano Barge va continuer à proposer des concerts ?
Oui, et c’est moi cette fois qui m’occuperai de la programmation. Je suis en train de monter une association avec des passionnés avec poursuite des partenariats. Mais déjà il y a plein d’événements de programmés.

De quels genres ?
La cale est à la disposition de ceux qui acceptent de produire un concert, ce fut le cas cet été avec le chanteuse de jazz Anne Sorgues qui a produit son propre quartet et l’office de tourisme de Vannes qui a produit le concert de la harpiste Laura Perrudin. Nos partenaires en cette fin d’année sont La Clique du Clic théâtre d’impro, Blue Elephant Label Electro et NS Jazz pour les soirées Bœufs. La saison Piano Barge nouvelle version s’ouvrira en janvier.

Donc, le Piano Barge s’ouvre à des artistes de différents horizons maintenant ?
Oui, c’est très bien comme cela. La demande de s’ouvrir aux musiciens locaux et à d’autres musiques que le jazz correspond à une attente forte.

Côté communication, tout est très pro, c’est une mine d’info et ta page facebook très active. Les habitués peuvent même consulter le menu de la semaine et la recevoir par mail. Qui s’en occupe ?
C’est moi, et j’adore ça, mais cela me prend énormément de temps, trop ! Cela pourrait presque occuper un plein temps ! Et le site n’est plus à jour, puisque le partenariat avec l’association est terminé. Je dois me réorganiser…

Comment se passe le partage entre travail et la vie de famille ?
Et bien, ce qui me rassure c’est que mes quatre enfants – ils ont entre 19 et 13 ans – ont tous réussi leurs examens de fin d’année ! Pour moi, c’est un très beau cadeau ; comme s’ils me disaient « tu vois maman, on assure, ne t’inquiètes pas ! ». Depuis que nous avons ouvert il y a deux ans, il y a de nombreuses soirées où je ne suis pas là. Aussi j’essaye d’être présente le soir quand ils rentrent de l’école. Et puis le dimanche et le lundi je ne travaille pas. On a pu tous partir 15 jours en vacances début août. Je pense qu’au fond mes enfants sont assez fiers et heureux de me voir à la tête de ce bel endroit. La rentrée s’est bien passée aussi, je suis sereine de ce côté là.

Le piano barge ferme en ton absence ?
Non, je délègue maintenant, j’ai confiance, mon équipe assure !

Pour terminer, Delphine, aurais-tu un conseil à donner aux Femmes de Bretagne ?
Savoir se laisser porter par son projet ! Au bout de deux ans, c’est rarement ce qu’on avait imaginé. Je pensais que j’allais m’éclater avec la musique, et comme j’ai sous-traité, j’y ai peu participé, et cela a été un souci.  Par contre, je me suis prise au jeu du monde de la restauration, cela m’intéresse de plus en plus, je vais bientôt faire un stage d’œnologie, et j’apprécie mon quotidien avec eux. Je me dis chaque jour, « j’ai le plus beau bureau du monde » !

Donc, il faut de la souplesse, savoir s’adapter en cas d’échec !
Oui, et en même temps, il faut tenir bon. J’ai été obsédée par l’ouverture du bateau. Le truc qui était important c’était que ça ouvre. Je ne pouvais plus reculer, il fallait mener la barque, au mieux. L’essentiel est de savoir prendre des décisions et aussi de s’appuyer sur des compétences. Je n’ai pas parlé de ma comptable, qui vient un après-midi par semaine, et me tient un tableau de bord assez serré, ce qui est très appréciable.

Tu as accueilli plusieurs réunions et aussi l’Assemblée générale Femmes de Bretagne…
Oui, après ma rencontre avec Marie Eloy, j’étais partante ! Se réunir dans un bel endroit, c’est important. Les gens qui organisent des séminaires chez moi me disent que cela a été porteur, ils en redemandent ! Je crois beaucoup à la force des lieux…

Anne Chaumont :  » Ce qui me fait avancer ? La joie de vivre ! »

Anne Chaumont a créé Up’Cycling France en septembre 2014 à Combourg. A partir de chutes de matériaux d’usine, elle crée des lampes et des objets de décoration plein d’élégance. En faisant rimer récup’ et design, elle nous parle de ses convictions.

Anne, peux-tu nous expliquer ce qu’est l' »Upcycling » ?
Avec l’upcycling, un objet en fin de vie ou un rebut de matière première est récupéré, pour en faire un autre objet. Mais l’upcycling exclut tout processus de transformation chimique (avec dépense d’eau, d’énergie). Il exclut aussi le transport sur de longues distances vers des sites de recyclage spécialisés. Le recyclage des bouteilles en verre, par exemple, a un bilan carbone très lourd. On parle aussi d’Upcycling quand on apporte une valeur ajoutée au produit, souvent de façon originale, artistique. C’est un challenge très motivant.

La lutte contre le gaspillage, c’est une préoccupation que tu as depuis longtemps ?
Depuis très longtemps, car j’ai été élevée en partie par ma grand-mère qui était maraîchère dans les Vosges. Elle travaillait dur, par tous les temps. Elle était très généreuse mais chez elle rien ne se perdait, tout se transformait. Cela commençait avec la nourriture, ma mémère était la reine des plats retravaillés à partir des restes de la veille. C’était délicieux !

Grâce à elle tu ne supportes pas le gaspillage !
C’est vrai ! Puis, lorsque j’ai quitté la maison à 19 ans pour aller à Londres, j’ai dû me débrouiller toute seule. Les meubles de ma chambre provenaient déjà des trottoirs de mon quartier ! Je les avais réparés et customisés. J’ai encore certains d’entre eux chez moi, car ils sont devenus emblématiques de ma démarche et j’y suis très attachée. J’ai beaucoup de mal à jeter ce qui peut servir.
Plus tard, j’ai épousé un Brésilien qui m’a fait voir à quel point ici nous gaspillons nos ressources. Nous avons des poubelles très « riches » ! Et les nouvelles plateformes de collecte et de tri des déchets de nos communes sont devenues un non-sens, où tout est jeté sans possibilité de collecte ou d’échange entre particuliers.

Comment t’est venue l’idée de te lancer dans cette entreprise ?
J’ai occupé pendant plus de 20 ans des fonctions de commerciale et gestionnaire d’entreprise. A force de travailler avec des chiffres, des statistiques… j’ai fini par me sentir déconnectée de la réalité. Je rêvais de toucher, palper mon travail, de retrouver des valeurs, de sentir que je pouvais changer ce qui ne me plaisait pas.
Après la mort de mon père, j’ai eu un déclic. J’ai réalisé que la vie est trop courte pour passer à côté de soi et de ceux que l’on aime, pour de l’argent, un statut…
J’ai pensé au traitement des déchets tout naturellement. Tout au long de ma carrière, j’avais été impliquée dans des groupes de réflexion ou d’action sur la réduction de nos pollutions industrielles. Ma mère répare et vends des objets anciens depuis des années. Une nuit, j’ai décidé que j’allais faire des objets à partir de ce que l’on jette, avec des gens que l’on rejette, tout près de chez moi, et que le résultat serait du haut de gamme. J’ai voulu pousser le concept jusqu’au bout dans toutes ses dimensions. Voilà comment j’ai voulu donner du sens et une âme à des objets, mes objets.

Up’Cycling France travaille avec des personnes handicapées, parle-nous de cette collaboration…
Je savais qu’il y a beaucoup de compétences et métiers différents dans les ESAT (Etablissement et Service d’Aide au Travail), mais j’ai découvert plus que cela quand je suis allée à leur rencontre !
Ce sont des établissements où l’on trouve des dirigeants et des chefs d’ateliers de tous horizons. Des gens qui au quotidien trouvent des astuces pour palier les difficultés issues du handicap de leurs salariés. Ils ont une imagination inépuisable. Et là où dans les entreprises on irait chercher de la technologie, eux trouvent des solutions souvent bêtes comme chou, plus simples et efficaces.

Alors Up’Cycling et les ESAT, c’est une collaboration réussie ?
Oui ! Je rencontre au quotidien des gens heureux de travailler, souriants et fiers de ce qu’ils font (toutes tâches confondues), et dont le travail est de qualité.

Cette démarche est « éco-responsable » à plus d’un titre ! Le public est-il sensible à cela ?
Le public y est sans doute sensible, mais pas suffisamment pour accepter de payer un peu plus cher ! Je mise donc sur la volonté des entreprises, et une démarche volontariste des professionnels pour avancer, car je crains que les clients particuliers soient difficiles et longs à convaincre. Mais je ne baisse pas les bras pour autant !

Quel genre de matériaux ou objets recycles-tu ?
Je recycle des chutes de matériaux initialement destinés à la réalisation de plans de travail de cuisines ou salles de bain, ou d’agencement de magasins haut de gamme, notamment du marbre artificiel et des stratifiés compact. Je m’inspire aussi d’objets que je détourne. Je travaille actuellement sur des instruments à vent et des composants de métiers à tisser industriels récupérés dans les Vosges.

Tu n’as pas de difficultés à t’approvisionner ?
Si, et je dois d’ailleurs varier mes sources d’approvisionnement. Je souhaiterais pouvoir négocier directement avec les fabricants des matières premières qui ont des quantités phénoménales de malfaçons et jettent en conséquence.

Es-tu à la recherche de nouveaux matériaux ou fournisseurs ?
Oui toujours. Je recherche actuellement des chutes de cuir épais et du bois.

Raconte-nous un de tes plus beaux moments depuis que tu as créé Up’Cycling…
Le jour où nous avons fini de monter ma première série de luminaires. J’avais apporté quelques ampoules électriques pour les tester. Notre petit groupe de personnes handicapées, huit au total, était assis autour d’une grande table. Chacun a vissé son ampoule et à mon signal, ils ont pressé l’interrupteur, toutes les lampes se sont allumées, ils se sont alors levés en criant de joie et en applaudissant. Une joie sincère et franche comme je n’en avais jamais vu en entreprise auparavant, elle venait du cœur et de leur fierté d’avoir réalisé les lampes. J’ai eu beaucoup de mal à ne pas pleurer. Vous savez, ils applaudissent encore à chaque test de lampe, et rien que cela, ça vaut tous mes mercis !
Que cherches-tu dans le réseau Femmes de Bretagne ?
Des rencontres et du partage. J’aimerais aussi que mon expérience puisse aider d’autres femmes.

Alors si tu devais donner un conseil aux femmes qui veulent se lancer, ce serait quoi ?
Ayez de la volonté, de l’optimisme, une dose d’insouciance et un environnement aimant !

En quoi as-tu changée depuis le début de cette aventure ?
Je suis enfin en accord avec ce que je crois être moi, mais je découvre un nouveau petit morceau de moi tous les jours, notamment parce que je m’autorise enfin à rencontrer et écouter les autres. Autre point, je me débarrasse lentement des 45 kilos en trop que j’ai pris dans ma vie pro précédente, quel soulagement ! Mon corps me rend le plaisir dont je l’avais trop longtemps privé.

Qu’est-ce qui te fais avancer dans la vie ?
La joie de vivre, et une envie irrépressible de rire tous les jours.

Quel est ton rêve Anne ?
Rencontrer quelqu’un avec qui partager ma passion et à qui transmettre mon activité.

Céline Domino : « Je fais ce que j’aime »

Céline Domino

Céline Domino est la créatrice de Princesse Model, à Rennes. Cette passionnée de costumes crée de A à Z des déguisements hauts de gamme, un créneau délaissé où elle a fait sa place, grâce à sa créativité et son sens de la communication. Les pieds sur terre et la tête dans les contes de fées.

Céline, quand et comment a commencé l’aventure Princesse Model ?
Je me suis mise à mon compte en avril 2006, à Rennes où j’habitais depuis quatre ans. Nous nous y étions installés, avec mon mari et ma fille alors âgée de quelques mois après avoir quitté Paris où je travaillais dans le marketing, pour la chaine de parfumerie Sephora. J’avais envie de m’épanouir, d’entreprendre. Je cherchais une idée… Je voulais aussi pouvoir m’occuper de mon bébé. J’aime travailler chez moi, seule.

Tu étais depuis longtemps attirée par la couture ?
Non, et je n’ai jamais pris de cours de couture ! Par contre, je suis très manuelle, et j’ai beaucoup vu ma mère coudre. Et mes études d’histoire de l’art m’ont sans doute inspirée pour dessiner et imaginer mes robes 18e, notamment un de mes cours : « architecture et le décor des grandes demeures »… Je me suis toujours intéressée à l’histoire du costume et de la mode ; j’aimais aller au musée Galliera, à Paris.

Qu’est-ce qui a été le déclic pour commencer à créer ?
C’est ma fille qui a tout déclenché ! Elle m’a dit un jour « Maman, je veux une robe de Blanche Neige ! », et je me suis lancée, je lui ai fait sa robe. Cela m’a beaucoup plu. Peu à peu, j’ai créé d’autres modèles, j’en ai parlé autour de moi. J’ai créé mon propre site internet…

Toute seule ?
Oui et je recommande à toutes celles qui le peuvent d’essayer de se former et de se lancer, c’est très instructif et enrichissant. J’ai continué dans ce sens, et en parallèle de mon activité j’ai développé pour d’autres personnes des sites très simples. Cela m’a permis de développer d’autres compétences.

Là encore, tu as une position d’autodidacte…
J’ai toujours eu une certaine curiosité pour l’outil informatique. C’est un plus. J’aime expérimenter, essayer. Au début ce n’est pas facile, puis quand on voit que l’on maîtrise, cela devient un jeu.

Ta présence sur internet t’a aidée pour le développement de ton activité ?
Oui et je me suis lancée à fond très rapidement. Je me suis dit que ce n’était pas parce que mon activité était naissante et encore incertaine que je ne devais pas faire « comme les grands ». J’ai visé haut ! J’ai toujours mesuré l’importance de bien communiquer. Je m’efforce toujours de le faire de façon positive.

Sur quels réseaux t’es-tu appuyée pour lancer ton activité ?
J’étais en recherche de réseautage mais je ne trouvais pas ce que je cherchais, alors j’ai moi-même monté un réseau de créatrices (Lescréatrices.fr), en 2008, puis un groupe Facebook. Nous étions au début une cinquantaine puis une centaine dans toute la France. J’ai été modératrice et cela n’a pas toujours été facile. J’ai dû devenir un peu « policière » ! Mais une fois de plus, en faisant, j’ai appris. J’aime l’idée de réseaux. Depuis, je travaille sur un nouveau projet, d’ailleurs je suis toujours en alerte sur internet.

Je crois que tu es très active sur le réseau Femmes de Bretagne ?
J’ai tout de suite vu le potentiel de ce réseau et aimé la ligne directrice que lui a donné Marie Eloy. L’entreprenariat au féminin. Le fait qu’il faut donner pour recevoir et que pour recevoir de l’aide, il faut en demander ! Et donner du temps, de l’écoute, c’est gratifiant, agréable.

Aurais-tu un conseil à donner aux adhérentes de Femmes de Bretagne ?
Oui, de profiter du site internet pour demander de l’aide. Et pour cela, il faut être claire dans la formulation de la question. Bien réfléchir à sa demande, et bien la formuler : tout doit être dans le titre ! Pour celles qui veulent travailler à domicile, d’essayer autant que possible d’établir des limites entre la vie « privée » et le travail, des limites dans le temps ou dans l’espace, à inventer !

Ta famille a-t-elle été un soutien à tes débuts ?
La décision de créer cette entreprise a été prise à deux. Mon mari, qui a la tête sur les épaules, m’a dit « vas-y, lance-toi », tout en m’encourageant à ne pas perdre de vue la rentabilité. Le fait qu’il soit comptable m’a bien sûr aidé, c’est une chance. Je travaille depuis le début avec le statut d’auto-entrepreneur, et cela me convient. En consacrant un peu de temps régulièrement à l’administration et avec un peu d’organisation, on y arrive !

Parlons maintenant de Princesse Model, quelle est ton actualité ?
Mon activité est très aléatoire, mais comme souvent en juin, j’ai eu énormément de travail, grâce à un événement qui commence à être assez reconnu : un bal pour enfants à Versailles ! J’organise aussi depuis cinq ans un concours de dessin qui me tient très à cœur (je réalise la robe dessinée par la gagnante du concours). En un mois, je reçois des centaines de dessins.

C’est tout une logistique un tel concours !
Oui, j’ai d’abord cherché des partenaires, qui peuvent être aussi membres du jury, et plus il y a de partenaires, plus il y a de cadeaux à distribuer ! Ainsi 90 petites filles ont été gagnantes cette année ! Je travaille avec de grandes marques, mais aussi des créatrices comme moi, certaines rencontrées sur Facebook. Cela demande beaucoup d’organisation et de temps mais en retour ce que je reçois est important pour moi. Certaines petites filles s’investissent beaucoup, je reçois des remerciements de maman qui me touchent vraiment, et il y a une relation de confiance qui s’instaure. Ce n’est pas que du marketing !

Tes créations se situent sur du « haut de gamme », c’est ton choix depuis le début ?
Oui, car je veux offrir de la qualité, de la cohérence, de la conception aux finitions. J’apporte du soin aux associations de couleurs, au choix des tissus, à la découpe, à toute la réalisation. En plus de la qualité des matériaux que j’utilise, ce travail artisanal et sur mesure demande du temps, alors bien sûr cela a un coût.

Quelle est la marque de ta machine à coudre ?
Bernina, une marque suisse, pas la plus connue. Pas pro mais familiale, avec toutes les options qui font la différence !

Penses-tu un jour créer aussi pour la gent masculine ?
C’est l’univers des petites filles qui m’inspire depuis le début, qui exalte mon imagination. C’est ma sensibilité et c’est devenu ma marque de fabrique. Pour l’instant je ne me vois pas changer.

Je te laisse le mot de la fin.
En huit ans j’ai fait beaucoup de chemin et aussi plein de belles rencontres. Je fais ce que j’aime. Aujourd’hui j’ai plein d’idées qui mûrissent, et en projet une collection un peu différente, mais pour l’instant, c’est secret !